The Reef
Les films de requin c'est un peu comme la loterie : une chance sur un million de tirer le gros lot. En effet, pour un Dents de la Mer réussi (et toujours référence ultime du genre), combien de Shark Attack, Shark in Venice et Cruel Jaws les yeux effarés du spectateur ont-ils dû subir?
Partant de ce postulat, l'annonce d'un nouvel essai cinématographique ayant pour thème principal nos chers squales n'avait pas vraiment de quoi faire frémir d'impatience l'amateur de boucherie aquatique.
Et pourtant... il faut croire que l'Australie a le don de redonner un coup de fouet au genre animalier, puisque après Black Water et Solitaire (avec des crocodiles), voici venu l'excellent The Reef.
Bienvenue dans un monde hostile où un bout de mousse vaut qu'on affronte un requin au péril de sa vie.
C'est ça, profitez bien de la plage...
Quatre amis, accompagnés d'un vieux loup de mer, partent en excursion sur l'océan. Mais alors qu'ils traversent une zone connue pour être infestée de requins, leur bateau percute un obstacle et commence à couler...
On fait déjà moins les malins!
Le point de départ n'est pas sans rappeler Open Water, sorti en 2003, mais en plus excitant. En effet, au lieu d'un couple, nous avons cinq protagonistes et donc, plus de possibilités quant aux situations qu'ils devront affronter ainsi qu'une gamme étendue d'éventuelles morts. Pour ne rien gâcher, les acteurs sont inconnus (chez nous du moins), ce qui permet au suspense d'être maximal puisque le spectateur européen ne peut deviner à l'avance qui va s'en tirer... ou non. Précisons que ces acteurs sont tous excellents et parfait dans leur rôle.
Les personnages ont des réactions très crédibles, des questionnements légitimes et chacune de leurs actions, mêmes celles qui apparaissent déraisonnées, seront guidées par une logique implacable liée à la volonté de survivre.
Cette crédibilité totale ne fait que renforcer la tension permanente de The Reef puisqu'il n'est pas question ici de faire mourir un personnage pour le plaisir, au détour d'un retournement de situation crétin. Même le requin se comporte de manière précise, en attendant son heure, rôdant dans l'eau telle une ombre fantômatique, épuisant ses victimes et frappant au moment opportun.
Bref, il y a eu un excellent travail au niveau du scénario.
Course contre la mort...
Ce souci du détail se retrouve également au niveau de la réalisation car jamais le réalisateur ne dérogera à son style de départ, c'est-à-dire un point de vue AVEC les personnages. En gros, le spectateur ne voit que ce que les héros voient, sans plus, et à l'exception d'une séquence nous montrant le marin resté sur le bateau en mauvaise posture, on ne saura que ce que les personnages savent. Pas de narrateur omniscient, pas de séquence extérieure à l'aventure de nos naufragés afin de faire retomber la tension, bref, pas d'échappatoire. Du début à la fin, le spectateur souffrira avec les malheureux, ressentira presque le même épuisement moral qu'eux, et sautera de joie à la vue d'un petit rocher à fleur d'eau (j'exagère à peine).
Ce faisant, le réalisateur a su conserver une tension permanente malgré le fait qu'on ne voit que très peu le requin. Un aileron, une mâchoire et quelques apparitions floues, that's all.
Franck Dubosc est sur un bateau. Le bateau coule...
Ce dernier point met en lumière ce qui peut être considéré le seul "défaut" du film: son manque d'action. J'ai mis les guillemets car pour ma part, c'est une qualité dans ce cas, mais ce ne sera pas l'opinion pour tout le monde.
Il faut bien dire que le film ne plaira pas aux amateurs de films d'action survitaminés et aux amateurs de boucherie réfractaires aux films d'ambiance. Ici, tout se joue sur la suggestion et la paranoïa des personnages face au danger qui les entoure. Par exemple, on est bien loin du sympathique Peur Bleue et de ses requins en image de synthèse.
Il ne faut donc pas venir chercher dans The Reef ce qu'il ne veut pas donner, c'est-à-dire de l'action à tout-va avec des morts sanglantes et des corps en charpie. On n'est pas dans Piranha 3D, mais dans un huis-clôs étouffant (oui oui, un huis-clôs en pleine mer...), crédible et éprouvant.
Indispensable.
Un film de Andrew Traucki
Avec : Adrienne Pickering, Damian Walshe-Howling, Gyton Grantley, Zoe Naylor