Témoins du mal, Les
Ai-je bien fait de tourner dans ce film ?
Le scénario du film a tout du film lent et langoureux mais instaurant une ambiance particulière et parfois malsaine. Il faut dire que l'Espagne n'a pas son pareil pour mettre en avant des films d'épouvante, et que parfois, ça lorgne du côté asiatique et des films japonais en terme de vengeance fantomatique. Donc ici, on va suivre une femme du nom de Francesca qui fait une dépression post-natale et son mari, pour tenter de la soigner, achète une grande maison au calme pour qu'elle puisse se reposer et élever au mieux son enfant. Mais (parce qu'il y a toujours un mais) des évènements surnaturels vont surgir des murs de la maison. personne ne veut croire Francesca pensant que sa dépression augmente. Entre temps, on va suivre un prêtre et on va entrer dans les méandres du clergé espagnol, avec son lot de cachotteries et de manipulation.
Alors bien entendu, on va découvrir qu'il s'est passé des choses par super drôles dans cette baraque, que l'église est mêlée à tout ce bordel et qu'en plus, une entité maléfique hante les lieux. En gros, le scénariste fait une sorte de pot-pourri de tout ce que l'on pourrait trouver en mélangeant religion et esprit. L'histoire en elle-même n’est pas mauvaise, mais tout cela est très lent et franchement peu passionnant.
Mais malgré une lenteur extrême, Elio Quiroga, le réalisateur, peut se targuer d'avoir un certain talent. En effet, si l'on excepte les raccourcis scénaristiques et l'absence complète d'action, la photographie et la réalisation sont vraiment bien maîtrisées. Les plans magnifiques se succèdent et les couleurs servent exactement le propos un peu nonchalant et extatique du métrage. Alors c'est vrai que c'est chiant, mais d'un autre côté, on peut dire que cela est en totale adéquation avec l'état d’esprit de l'héroïne. Seulement, je pense que l'ambiance ne prend pas assez appui sur les images d'archives qui sont de temps en temps proposées. Car au départ, on a aussi une histoire de journalistes de l'extrême qui vont filmer la guerre mais aussi les exorcismes et les miracles du Vatican. Ces journalistes, dont le nom est No-Do (d'où le titre original) ont, à l'époque, filmé quelque chose concernant trois fillettes au pouvoir magique. Durant tout le film on croit à quelque chose, puis la fin nous prend à revers, mais malheureusement, tout cela est trop long, trop lent et les apparitions des fillettes pas du tout effrayantes. C’est d'autant plus dommage qu'il y avait matière à proposer mieux.
Au moins les punitions d'antan étaient efficaces, c'était la belle époque...
Au niveau du casting, c'est assez déséquilibré et parfois on ne sait pas sur quel pied danser. Si l'actrice incarnant Francesca reste assez efficace, elle demeure tout de même dans le même registre tout le long du film et cela en devient presque ennuyeux. De plus, ses discussions internes avec son hypothétique fille sont relativement soporifiques et ne correspondent en rien à une surprise de taille, puisqu’on s'en doute dès le départ. Le mari demeure assez effacé dans l'histoire et je n'en parlerai pas plus. Par contre, le prêtre, essayant de convaincre sa hiérarchie pour avoir accès aux archives du No-Do est très très bon et il me fait penser à un croisement entre Sean Bean et Richard Roxburgh. D’ailleurs à quelque part, il a un rôle presque similaire au père Karas dans l'Exorciste, tout en étant plus lisse et en ayant un rôle moins important concernant le tollé contre l'église. Hector Colomé est très bon dans ce rôle et il demeure surement le personnage le plus intéressant. Ensuite, il reste la vieille folle cherchant désespérément son ancien amour et connaissant une grande partie de l'histoire mais ce personnage est relativement inintéressant.
Le plus gros défaut du métrage, c'est très certainement son manque flagrant d'énergie et surtout son manque inacceptable de moments vraiment horrifiques. Pourtant l'ambiance est là, la photographie bien maîtrisée, mais il manque vraiment quelque chose pour rendre le tout intéressant. Les différentes apparitions des fillettes fantômes sont toutes gâchées et alourdissent vraiment le côté effrayant du film. De plus, on n’évite pas les écueils du film de genre avec l'inscription en sang sur le mur ou encore l'aura noire enveloppant les esprits. Du coup, tout y passe et tout est vraiment attendu. C'est d’ailleurs ce que l'on fait tout au long du film, on attend. Si certains moments auraient pu être intéressants et instaurer quelque chose de malsain et de dérangeant, comme la découverte de la salle des miracles avec les différentes parties de mannequin qui pendouillent en l’air, ils sont foutus en l'air par des passages lénifiants au possible. L'attente devenant interminable, on ne s'attend finalement à plus grand-chose. Tout cela est vraiment dommage, d'autant plus qu'il y avait matière à faire mieux et que certaines idées sont très bonnes, mais mal exploitées.
non, ce n'est pas un Ewok...
Au final, Les Témoins du mal est un film ennuyeux et pas vraiment passionnant. Pourtant il y avait vraiment un potentiel avec une histoire mélangeant fantastique et église, et notamment une présence angélique assez surprenante. Malheureusement tout cela est plombé à cause d'une lenteur et d'une non prise de risque qui gâche tout.
Bref, un film à la beauté soignée mais à la lenteur insupportable et où l'absence de peur demeure vraiment un fardeau très lourd. Dommage pour ce film espagnol qui fait partie de ceux à éviter.
Un film de Elio Quiroga
Avec : Ana Torrent, Francisco Boira, Héctor Colomé, Rocío Muñoz