Tout comme les remakes et autres reboots, les films-live sont une manne providentielle pour les producteurs avides de bénéfices faciles en misant sur une histoire qui a déjà fait ses preuves dans un passé plus ou moins lointain. Le souci ? Comme trop souvent, le processus d'adaptation connaît quelques hauts et beaucoup de bas. Qu'il s'agisse de bandes dessinées, de jeux vidéo, de comics ou, en l’'occurrence, de mangas, on dénombre quelques perles nanardesques. Pour rester dans le domaine du manga, citons rapidement Dragonball Evolution, Blood - The last vampire, Devilman. Malheureusement, il est une raison si j'évoque des mauvais films et non des réussites. Vous l'avez compris, Hinamizawa fait partie de la seconde catégorie.
Vous les reconnaissez ? Moi, non plus.
Au vu de l'univers qui entoure le village maudit, l'on songe d'emblée que cette entreprise est vaine. Comment condenser près de 20 heures de programme (sans compter les saisons 3 et 4 purement anecdotiques) en 110 minuscules minutes ? Un second problème survient : la narration subdivisée en arcs. L'on se souvient de ce procédé alambiqué et tortueux qui recelait une indéniable originalité et exigeait du spectateur une réelle implication. D'un certain côté, ce dernier point peut amener à résoudre le premier. Tout simplement en choisissant un arc et en s'y tenant. Ah, j'oubliais les autres parties du récit sont occultées d'une bien piètre manière, mais ne brûlons pas les étapes.
Pour ceux qui auraient vu l'anime, l'histoire n'offre pas de grande surprise et s'axe sur le premier arc de la première saison, soit le Chapitre « Enlevé par les démons ». L'on découvre l'arrivée de Keiichi à Hinamizawa, le quotidien du village, les rumeurs qui y circulent concernant une malédiction et d'étranges rituels. Le choix est bon puisque cette séquence est sans doute la plus percutante (on ne sait pas à quoi s'attendre et la première approche est un vrai choc, du moins dans l'anime). En partant de ce segment, on dispose d'un excellent a priori sur le scénario.
C'est hideux et ça n'a rien à foutre là. Non, mais franchement...
Seulement voilà, cette partie était faite pour installer les personnages et l'ambiance en posant foultitude de questions et là, le bât blesse. En effet, les novices auront la gageure d'ingurgiter un monceau d'informations, parfois indigestes, concernant l'histoire du lieu, des protagonistes, les différentes implications sur les événements passés, les us et coutumes... Bref, là où l'anime nous présentait ces mêmes éléments dans un espace de temps plus large, ici on les retrouve régurgités pêle-mêle sans discontinuer. Au final, le nouveau venu se posera un tas de questions auxquelles… il ne trouvera aucune réponse.
Derrière ce constat pour le moins frustrant, on aurait pu espérer que le reste du film donne néanmoins envie de découvrir l'anime. Toutefois, la liste de défauts ne s'arrête pas aux limites du scénario. En effet, les premières images laissent augurer une réalisation calamiteuse. La suite confirmera ces dires. Au vu du passif d'Ataru Oikawa (la saga Tomie que je n'ai pas encore vu, mais aussi Appartement 1303), on escomptait un travail honnête sans être irréprochable. Tant la mise en scène que la photographie rappellent d'immondes séries Z, voire un épisode « Made in Japan » des Feux de l'amour. C'est pitoyable au possible.
Cette jeune demoiselle est en colère.
Certes, les bruitages demeurent sympathiques. Le chant presque constant des cigales est le seul élément qui concoure à instaurer un semblant d'ambiance. Là où le malsain et l'oppressant occupait l'anime, on nous inflige ennui et maladresses. Les musiques s'agencent cahin-caha dans la débâcle sans trouver une réelle place. On découvre même une incursion "stylée manga" en la présence d'onomatopées sous forme de kanji (présent dans un unique passage) du plus mauvais goût. C'est ridicule et le peu d'effets spéciaux exposé à l'écran est abominable. Les yeux de Rena et Mion lors des moments « tendus », le sang couleur ketchup périmé... Absolument rien de potable.
Pourtant, tout ceci n'est rien en comparaison du jeu des acteurs. Rarement, il m'aura été donné de contempler un casting aussi peu impliqué dans leur rôle respectif. En général, l'Asie est à l'aise en terme de mise en abîme des peurs enfouies, des atmosphères pestilentielles, et ce, grâce à des interprètes convaincants, pleinement investis. Ici, les expressions faciales se résument aux froncements de sourcils pour la colère, un sourire béat pour traduire la joie et le bonheur. En ce qui concerne les nuances, elles sont aux abonnés absents. Un constat d'autant plus déplorable qu'il fallait flouer les frontières entre les sentiments et émotions des protagonistes afin de créer la paranoïa ambiante de l'anime. Qui est qui ? La personnalité apparente n'est-elle qu’une façade ? Encore des questions qui resteront en suspens.
Brrr, une cinglée doublée d'une mauvaise actrice avec des yeux jaunes.
Les personnages de l'histoire sont à l'image du scénario : on multiplie leur nombre sans faire étalage de leur caractère. En clair, on se concentre sur Keiichi, Rena et Mion en lésant Rika, Satoko et les autres. Qui plus est, leur ressemblance physique est trop similaire pour les différencier. On ne demandait pas de leur mettre des couleurs de cheveux extravagantes, mais tenir compte de leur âge (la pluralité cède la place à une classe moins "hétéroclite") et trouver des traits suffisamment dissemblables était un minimum.
Cruelle déception que cette adaptation live. Au lieu d'être en présence d'un film honnête et respectueux de l'histoire originale, on nous inflige une production peu scrupuleuse qui multiplie les défauts à tous les niveaux. Acteurs au rabais, réalisation approximative et chaotique, rythme lancinant qui englue les tenants du scénario dans un ennui profond, le film d'Ataru Oikawa ne fait montre d'aucune qualité pour donner l'envie de découvrir l'anime. Les questions posées ne trouvent pas de réponse et pour cause, le récit d'Hinamizawa est beaucoup trop complexe et alambiqué pour le format d'un long-métrage. Il en ressort un grand moment de frustration.