Le Monde fantastique d'Oz
Oscar Diggs est un magicien sans envergure qui multiplie les tours de pacotilles pour impressionner une foule crédule. À la suite d'une altercation, il s'enfuit dans un ballon, mais échoue dans une tornade à la violence inouïe. À son réveil, il découvre le merveilleux pays d'Oz et ses habitants...
Inutile de présenter Sam Raimi, l'homme derrière une certaine saga culte horrifique et la trilogie Spiderman. Après avoir été remercié par les producteurs de ce dernier et nous avoir offert Jusqu'en enfer, film d'horreur qui semblait renouer avec ses racines au cinéma de genre, le réalisateur part pour l'univers magique de Disney, pardon d'Oz, pour se pencher sur une relecture du grand classique de Lyman Frank Baum. Non pas en dénaturant l'oeuvre originale, ni en nous infligeant une version « modernisée », mais en proposant une préquelle au roman.
Une petite excursion bucolique ?
On ne parlera pas de fidélité étant donné que Le monde fantastique d'Oz suit des événements antérieurs à la célèbre histoire. Pourtant, on aurait tendance à se demander si ce voyage au pays d'Oz demeure respectueux de ce que l'on peut connaître. Le moins que l'on puisse dire, c'est que Disney ne lésine pas sur les moyens avec un spectacle à la hauteur (ou presque) de l'imaginaire du public (petits ou grands). Engranger près de 200 millions de dollars n'est pas sans conséquence, ni risque. Après la débandade de John Carter, Disney ne se décourage pas pour autant et récidive dans la grandiloquence, le démesuré et le somptueux. Qu'on se le dise, Oz est d'une finesse éclatante.
Tout commence par un générique et une introduction aux atours désuets. Une musique d'époque, une image 4/3 en noir et blanc qui n'est pas sans défaut. Cette remontée dans le temps offre à cette mise en place un aspect rétro sublime, mais pas seulement. Derrière ce splendide effet de style se cache la volonté de banaliser la réalité, la rendre fade et insipide avec des artifices ridicules pour tromper la morosité quotidienne. Comme si les codes de la société déteignaient sur les individus pour en faire des êtres vils et asservis. On le voit avec le personnage principal, mais nous y reviendrons plus tard.
On ne bouge plus, la petite sorcière va sortir...
La transition s'opère avec le réveil au pays d'Oz. L'image s'allonge progressivement, se colorise et nous offre un panorama à couper le souffle. Cette première incursion dans cet imaginaire fantasmagorique est représentative du film : d'une beauté incroyable où le mot féerique prend tout son sens. Qu'il s'agisse de la forêt sombre, du palais d'émeraude, de la cité bulle ou les contrées aux reliefs aléatoires, le cadre est prétexte à l'oubli et l'émerveillement devant un florilège d'effets spéciaux, mais pas seulement. Illusion parfaite entre décor réel et images de synthèse, les rétines s'écarquillent pour mieux appréhender cette effervescence de tous les instants.
Les couleurs sont vives, contrastées et animent des tableaux contemplatifs au design inspiré et recherché. On ne peut que s'extasier face à tant de variétés dans la faune, la flore et les architectures alambiquées. La mise en abîme de certains plans confère à l'onirisme. Les rayons du soleil à travers la cime des arbres, la lune éclatante, l'escapade en bulle... Si le scénario peut paraître prévisible en se contentant de suivre une trame assez classique, on ne peut s'empêcher de l'arpenter avec intérêt tant l'environnement flatte la rétine et les sens. C'est bien simple, on a l'impression de faire un rêve éveillé.
Zim Zala Bim !
Certes, l'histoire reste traditionnelle entre conte et fantasy, mais ce n'est pas pour autant que les personnages sont lésés. Il existe une véritable évolution dans leur caractère. Oscar Diggs est bien entendu l'exemple type de l'individu antipathique qui révèle une part de générosité au fur et à mesure de sa découverte. On notera également un parallèle étonnant avec les protagonistes de l'introduction. Le fidèle comparse Frank transformé en singe volant, le bien nommé Finley, la petite fille en fauteuil roulant et celle en porcelaine ou plus évident (le physique est identique) Glinda et la gentille sorcière du Nord. Les acteurs ne sont pas en reste puisqu'ils paraissent aussi émerveillés que nous. Il n'est pourtant pas aisé de jouer face à un écran vert ou l'on devine des babouins volants hargneux, des fées d'eau aux dents de piranhas ou un voyage au-dessus des nuages...
La magie est donc au centre du monde fantastique d'Oz (pour une fois, le titre n'est pas usurpé). Tout d'abord maladroite et désuète, puis vraisemblable grâce à un univers démesuré où les limites à l'imagination n'existent pas. La magie que l'on voit à l'écran n'est pas forcément la plus importante. Certes, elle se trouve en premier plan et l'on en conservera un souvenir marqué. Toutefois, l'on ressent également la magie dans le coeur des gens. Qu'il s'agisse de la réalité ou du pays d'Oz, ils sont animés d'une croyance commune pour le rêve et l'impossible. Si les deux univers sont aux antipodes, la magie les réunit sur ce point.
Faut sauter le pas... et le bon !
Bref, le dernier film en date de Sam Raimi est un petit bijou cinématographique. Malgré un scénario assez sommaire, l'on préférera s'attarder sur une vision (le terme n'est pas exagéré) inspirée et respectueuse de l'oeuvre originale. Véritable réussite visuelle où le pays d'Oz fait montre d'une beauté stupéfiante, Le monde fantastique d'Oz est propice à la rêverie. Il vous laisse vaquer à travers son monde comme si c'était le vôtre. On s'approprie très vite l'univers et l'on arpente ces chemins plus ou moins tordus avec un bonheur non dissimulé. Si en plus vous voyagez en une très plaisante compagnie, alors...
Cette critique a été écrite avec la contribution de Christelle, Éléonore, Solène et Annie.
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