Piraconda
Le survival animalier est un genre bien mal en point depuis quelques années. Mis à part quelques exceptions prêtes, il fait la joie de producteurs peu scrupuleux adepte du fric facile et des bouses sur pellicules. Le filon a épuisé tout ce qui était inimaginable de faire avec des requins, des serpents, des ours, des araignées, des loups... Enfin, inutile de citer toute la faune qui peuple notre jolie planète, mais cela montre clairement l'exploitation outrancière d'un scénario malingre et du succès des piliers du genre. Pourtant, nous devons compter sur l'incroyable culot et débilité de studios tels que SyFy ou Asylum pour nous pondre des absurdités plus grandes que leur ego.
Ah, ces hélicos, toujours aussi savoureux !
Car, en ces temps incertains, il se terre une nouvelle espèce de nanar animalier. Après les crossovers de créatures géantes (la série des Mega shark, Dinocroc Vs Supergator, Komodo Vs Cobra...), voici venu surgit des tréfonds de la connerie et de la nullité abyssale : les bestioles hybrides !!! La recette ? On mélange deux prédateurs qui n'ont pas forcément de points communs (on s'en fiche littéralement) pour en faire un monstre de foire affreux, pas matinal pour un sou et mort de faim. Ainsi, l'ignoble procédé nous a déjà offert le misérable Sharktopus. Mais pourquoi changer un concept débile sans queue ni tête ?
L'on pousse le vice jusque dans le titre (en général le nom de la chose). Comble de l'idiotie, l'appellation potable piranhaconda devient piraconda dans notre joli hexagone. À croire que tous ceux qui se sont rapprochés de ce film ont apporté leur touche de stupidité pour parfaire un produit minable. Et si son nom donne une vague idée de l'immondice, la créature en elle-même ne va pas en ce sens. Oui, l'on voit que nous sommes en présence d'un serpent, mais la tête ne ressemble à rien et surtout pas à un piranha. Quid du croisement ? La férocité du petit poisson ? Les dents acérées ?
La bête et... la bête.
Un constat d'autant plus navrant que le piranha et l'anaconda évoluent principalement dans l'eau. Hormis, l'attaque du bateau sur un fleuve étrangement calme, le piranhaconda se meut dans la forêt sans jamais y interférer. En effet, l'incrustation est approximative et l'on ne parlera pas de trucages à ce niveau, mais de foutages (vous l'aurez deviné, comme dans « foutages de gueule »). Les images de synthèses sont pénibles à contempler. Un amas de pixels à l'animation raide et bon marché qui se complaît dans un environnement incongru. En effet, là où l'on aurait pensé voir le film se dérouler en Amazonie au vu des deux espèces avancées et bien nous nous trouvons à... Hawaii !!!
Difficile de savoir où vont pêcher les scénaristes pour pondre des inepties pareilles, à moins qu'ils ne prennent des substances psychotropes pour décupler leur débilité innée. Outre les incohérences familières de ce genre d'idioties, l'histoire est écrite avec les pieds. Une équipe de tournage est séquestrée par un groupe terroriste (assez nombreux sur Hawaii, il est vrai) et se fait pourchasser non pas par un, mais par des piranhacondas. À cela, on ajoute un pseudo-scientifique qui veut étudier lesdites bestioles en enlevant un œ½uf. Et l'on n'hésite pas à un petit plagiat d'Anacondas - A la poursuite de l'orchidée de sang avec la recherche d'une orchidée dotée de pouvoirs rajeunissant.
Le seul plan qui mérite un minimum d'attention, c'est dire !
Quant aux personnages, ils n'en possèdent que le nom, même si l'on était tenté de les assimiler à de vagues esquisses caricaturales. Le chef terroriste un rien obsédé, le réalisateur balourd à l'esprit de sacrifice, le cascadeur sans peur et sans reproche... Mais ces caractérisations d'un autre temps se conjuguent parfaitement avec les acteurs. Entre un Michael Madsen qui débite des âneries plus grosses que lui (« mutation évolutive qui devient génétiquement modifiée ») ou une poignée d'inconnus aux expressions limitées, on demeure stoïque lorsqu'ils se font croquer.
Des attaques qui se résument à voir surgir le piranhaconda, encercler sa proie avec ses anneaux (il ne l'étouffe pas) et le picorer façon poule schizophrène pour s'amuser avec le hors-d'½uvre suivant. C'est bas de gamme et expédié à la va-vite. Toutefois, il est vrai que les victimes défilent sans temps morts et l'on retiendra surtout la succession de belles midinettes siliconées qui passent dans la gueule de l'animal. Basique et sans panache. Pour le reste, le sang se traduit par quelques gerbes assez rares ou un filtre rouge du plus mauvais goût en bas de l'écran. Malgré plusieurs prédateurs (facilement reconnaissables grâce à leurs différentes couleurs) et un florilège de chair à saucisse, on n'y croit pas une seule seconde.
Encore une qui a oublié la crème solaire pour l'instant bronzette.
Il reste à nous pencher sur ce que l'on peut appeler la réalisation. On remarquera d'entrée de jeu une musique irritante au possible qui n'a rien à faire là. En total décalage avec les images, le dynamisme de façade de la chanteuse ne passe absolument pas, mais c'est un moindre mal au vu des autres tares. On nous inflige constamment des cadrages merdiques qui coupent littéralement la tête des personnages (d'où peut-être le titre du film dans le film : Le coupeur de têtes 3 !). C'en est tellement grossier que le cameraman rajuste l'angle sous nos yeux, parfois non, préférant laisser un plan pitoyable.
Comme on pouvait s'y attendre, Piranhaconda est un énième affront au bon goût et au cinéma de genre. Affublé de bestioles moches, d'acteurs mauvais, d'une réalisation calamiteuse et d'un scénario au ras des bikinis, le nouveau film de Jim Wynorski ne mérite que mépris et ignorance de la part du spectateur. À la limite, on saluera le nombre conséquent de hors-d'oeuvre à la plastique avantageuse, mais ça n'enlève rien à la nullité générale de la chose. Un énième survival animalier destiné à sombrer dans l'oubli sitôt vu.
Un film de Jim Wynorski
Avec : Michael Madsen, Rachel Hunter, Diana Terranova, Terri Ivens