Epic : La bataille du royaume secret
Initiateur de la lucrative franchise L'âge de glace, Chris Wedge s'était fait plutôt rare dans le domaine de la réalisation depuis le moins bon Robots (qui date de 2005). Quelques doublages et productions plus tard, le cinéaste revient derrière la caméra avec Epic, sorte de croisement entre Arrietty et 1001 pattes. On le sait, il est très dur pour des studios de se faire une place dans le milieu de l'animation quand des mastodontes tels que Pixar ou Dreamworks occupent le haut du panier, même si cela n'est pas toujours justifié. Toutefois, les studios Blue sky sont parvenus à se faire un nom, non pas en multipliant les blockbusters à un rythme effréné, mais en offrant des métrages soignés pour un public familial.
Air Colibri, bonsoir !
Epic nous transporte dans un univers à la fois connu et mystérieux : la forêt. Pourtant, ce n'est pas forcément l'endroit paisible auquel l'on s'y attend. En effet, des êtres miniatures se vouent une bataille sans fin pour préserver la vie ou la pourriture qui jonche ses recoins sombres. L'on a droit à une mise en place assez trépidante, bien que déjà vu ailleurs avec des envolées virevoltantes entre les arbres et les branches que ne renierait pas un certain Tarzan. Toujours est-il que ce monde est invisible aux yeux des humains. Enfin, jusqu'à ce qu'un scientifique soit persuadé de leur existence...
Comme tout bon dessin animé qui se respecte, la première approche visuelle se révèle primordiale pour capter l'attention du spectateur. Ici, la beauté du cadre est frappante. La forêt dans son ensemble est presque photo-réaliste. Qu'il s'agisse des feuillages, des ruisseaux (les effets de l'eau sont splendides), des souterrains, tout est somptueux. L'environnement est un personnage à part entière où notre bande de héros se meut avec fluidité et naturel. Pour parfaire l'immersion, l'ambiance sonore peaufine l'excellence technique avec les bruissements, le vent, les pas crépitant sur un sol terreux ou de feuilles.
Veux faire partie des hommes-feuilles ! Moi, je préfère mon corps d'athlète !
Le soin apporté à l'enrobage dépeint un talent évident et une volonté toute particulière à offrir un film respectueux de son public. Si l'on poursuit sur l'aspect artistique, le design des protagonistes est plus cartoonesques avec des traits un peu plus grossiers. Ils disposent d'une véritable touche esthétique et ne jurent pas avec le travail fourni en amont sur le cadre. Quant à Chris Wedge, il connaît son métier et exploite pleinement le terrain de jeu disponible. Une mise en scène propre, dynamique et sans l'ombre d'une tâche.
Toutefois (et c'est là qu'Epic pèche principalement), l'agencement de l'histoire demeure très convenu. Malgré le fait d'implanter une humaine dans cet univers coloré, ignoré à certains égards, malgré la situation désespérée initiée au départ, l'on devine trop facilement les mésaventures qui attendent les protagonistes. Certes, les péripéties permettent une progression sans temps mort, trépidante même, mais le dénouement reste trop prévisible dès les premiers instants. Cela demeure plaisant, intéressant pour les mirettes, mais nullement surprenant.
Un héritage qui bourgeonne.
On dénotera une petite touche écolo qui ne pollue pas l'histoire. En effet, l'on apprend que tout être vivant, en dépit de sa nature unique, est relié aux autres, un peu comme les feuilles d'un arbre. L'allégorie est bien sentie, subtile et n'accapare (ou ne culpabilise) pas le spectateur comme l'avait pu faire Le lorax. On se penche davantage sur la confrontation entre vie et mort plutôt que sur un message puéril, naïf et sans fond. Un écueil qui aurait été très facile d'implanter dans le récit, mais est heureusement absent.
Au niveau des protagonistes, on reste dans un domaine très manichéen, très lisse également. Les héros sont classiques avec leur volonté d'indépendance, d'affranchissement des codes en vigueur. L'on retrouve le mentor pour les guider et leur montrer le droit chemin, les comparses comiques de circonstances, sans oublier un méchant très « méchant », un brin maladroit et attendrissant dans un rôle caricatural. L'humour est bel et bien présent, mais ne fait pas toujours mouche. On retiendra surtout le sympathique chien à trois pattes qui tourne et tourne en bavant sur ce tout ce qui bouge.
Prêt pour une bataille épique ?
Bref, Epic est un dessin animé techniquement abouti où l'animation est au service d'une réalisation sans faille. Devant ce savoir-faire évident pour nous offrir des divertissements de premier ordre, on regrettera tout de même l'apparente simplicité du scénario qui ne recèlera aucune surprise de taille. L'on songe à des films tels que Arthur et les minimoys, Le petit monde des Burrowers, Arrietty ou, dans une moindre mesure, 1 001 pattes ou Fourmiz. Toujours est-il que Blue sky nous propose « un petit bijou d'animation dans un écrin de verdure ». Distrayant, mais prévisible.
Cette critique a été écrite avec la contribution de Christelle, Éléonore, Solène et Annie.
Un film de Chris Wedge
Avec : Josh Hutcherson, Colin Farrell, Amanda Seyfried, Jason Sudeikis