Amityville : L'histoire vraie
Avec ses huit longs-métrages et un remake en l’espace de 25 ans, la saga Amityville se distingue surtout par sa longévité et non par ses qualités artistiques fluctuantes. À l’occasion de la sortie du film d’Andrew Douglas, un documentaire a été réalisé, non pour effectuer une rétrospective sur les précédentes productions, mais pour revenir sur les deux principaux faits divers. Ceux-ci ont donné lieu à une notoriété exponentielle, dépassant largement les côtes de l’île de Long Island. Si le sujet a pu être évoqué dans d’autres itérations télévisuelles, notamment lorsqu’on se penche sur le travail du couple Warren dans le domaine de l’occultisme, le présent documentaire fait un point sur le mystère du 112 Ocean Avenue.
Un accueil toujours aussi chaleureux
Pour rappel, l’affaire Amityville se scinde en deux parties distinctes. Le meurtre de la famille DeFeo et l’emménagement des Lutz. Ce qui s’apparente à un drame familial prend une tournure paranormale avec la supposée possession du principal accusé: Ronald DeFeo. D’une manière assez rigoureuse, la première partie tend à dépeindre les faits par le biais de témoignages, de photos d’archive et même d’une interview de Ronald dans les années1990. Le ton s’axe principalement comme une émission de faits divers où la narration se fait avec retenue. Entre autres, celle-ci décrit les circonstances, le mobile éventuel et le déroulement des faits dans l’ordre chronologique.
Le travail d’enquête reste précis et profite d’avis de première main, comme les journalistes qui ont couvert l’affaire ou l’avocat du prévenu. Le documentaire a le mérite de faire preuve du recul nécessaire pour replacer les événements dans leur contexte. L’histoire a tellement été triturée dans tous les sens qu’après plusieurs décennies, il paraît difficile de démêler le vrai du faux, la réalité de la légende urbaine. Certaines pistes écartées par la fiction sont pour le moins troublantes, comme la possible implication de Dawn DeFeo dans le massacre de sa famille. Une explication qui justifie certaines errances des investigations où l’on soupçonnait un éventuel complice pour tenir en respect les victimes.
Une petite visite du musée privé des Warren avec Annabelle pour guide !
De fait, la théorie de la possession démoniaque est mise à mal. Et cette objectivité se retrouve dans une seconde partie où l’on donne cette fois-ci la parole à George Lutz. Sa version des faits précède celles d’intervenants extérieurs. Enquêteur, journaliste, parapsychologue et autres «experts» se succèdent. On part du postulat que le récit des Lutz est de bonne foi avant de mettre l’accent sur les incohérences et les contradictions qui en résultent. Certes, la réalisation reste en retrait de toute interprétation ou de parti pris, mais l’on sent clairement que le scepticisme est prépondérant. Et cela ne tient pas uniquement à l’incrédulité d’éventuelles manifestations paranormales.
Certaines interviews démontrent des motivations mercantiles difficiles à occulter. Cela concerne majoritairement le couple Lutz et son comportement versatile à promouvoir ou non l’affaire, ainsi qu’à sa rencontre avec l’avocat de Ronald DeFeo. Quant à Jay Anson, l’auteur du best-seller The Amityville Horror, l’homme se moquait bien de la véracité des faits. Il flairait simplement la poule aux œufs d’or pour ne plus avoir à travailler ou écrire. Assez accablant, tout comme l’absence d’antécédents ou de suite entre cette parenthèse «DeFeo - Lutz». Bien qu’il reste certains pans inexpliqués et que certains éléments demeurent assez troublants, la résolution de l’énigme tient peut-être uniquement aux dérives de la cupidité.
Quand le faux George Lutz rencontre le vrai...
Au final, Amityville - L’histoire vraie est un documentaire court qui a le mérite d’aller à l’essentiel. La réalisation se permet de recentrer l’affaire dans son contexte avec un pragmatisme indissociable de l’exercice. La progression se veut dynamique et la rigueur journalistique se contente de relayer les faits sans interprétation aucune. Un point basique dans la déontologie de la profession qui lui fait néanmoins cruellement défaut depuis de nombreuses années. Toujours est-il que des éléments peu connus ressurgissent et donnent à Amityville un arrière-goût amer, où l’argent facile et la crédulité ne sont jamais très éloignés des phénomènes paranormaux et des manifestations diaboliques.
Un film de Craig Collinson, Nick Freand Jones
Avec : Zoë Wanamaker, Eric Barlow, Niall Greig Fulton, Stephen Murphy