All the Creatures Were Stirring
Les films à sketches ont le mérite de mettre en scène des récits dont le contenu ne peut tenir sur la longueur. En ce sens, le principe reste similaire à un recueil de nouvelles. Le concept peut compiler des histoires qui ne présentent pas forcément de liens entre elles. Toutefois, la majeure partie des productions proposent un fil rouge et une thématique précise. Qu’il s’agisse de science-fiction, d’horreur ou même de fantastique, la cohésion de l’ensemble permet ainsi d’exploiter un sujet sous différents points de vue. All the Creatures Were Stirring souhaite donc s’insinuer dans les contes de Noël, mais pas sous l’angle angélique qui leur sied généralement. Une idée déjà évoquée avec A Christmas Horror Story.
Et le Père Noël secret de cette année est...
Pour ce faire, l’introduction des histoires se fait par l’entremise d’une représentation théâtrale dans un cadre aussi médiocre que les acteurs sur scène. La décoration dépouillée et les exercices de mime pathétiques auxquels ils s’adonnent sont censés illustrer chaque récit. Du point de vue du public, l’aspect fauché reste délibéré. Ce qui prête à sourire. Cependant, le fil rouge n’est nullement essentiel, n’en déplaise à cette volonté d’insinuer progressivement la fiction à leur propre situation. Cela passe par des allusions, des réparties similaires ou encore des coïncidences. L’idée est bonne, mais elle demeure au stade des intentions.
Les intermèdes sont trop furtifs pour développer un contexte suffisamment crédible. De même, les personnages ne sont que des prétextes mal encadrés. L’aura ténébreuse, empreinte de mystères, de ce théâtre de quartier n’est donc qu’à peine esquissée. En ce qui concerne les histoires en elles-mêmes, elles présentent une variété évidente. On touche aux mythes de Noël, notamment avec « All Through the House », une version moderne d’Un Chant de Noël de Charles Dickens. Avec une approche expérimentale, l’essai reste amusant tant dans sa finalité que dans ce qu’il sous-tend, eu égard aux valeurs de Noël opposées au mercantilisme de notre époque.
Les décorations de Noël ne sont plus ce qu'elles étaient.
Seulement, toutes les histoires ne sont pas aussi complètes, dans le sens où elle présente une narration cohérente et une morale. Preuve en est avec « The Stockings Were Hung », censé dénoncer la compétitivité professionnelle au sein d’une grande entreprise. L’intrigue affiche une tonalité horrifique qui propose de jouer au Père Noël secret avec des cadeaux mortels. Un traitement guère emballant qui ne possède aucun épilogue et encore moins d’explications sur cette soirée de réveillon d’une tristesse absolue. Quant à « Dash Away All », l’idée initiale d’un croque-mitaine itinérant se révèle intéressante si elle ne présentait pas une multitude d’incohérences dans son déroulement.
Même constat pour « Arose Such a Clatter » qui part sur de bonnes bases avant de sombrer dans un ridicule consommé. Là où on s’attend à une réappropriation de la légende de Krampus, comme Saint l’avait fait avec Saint-Nicolas, on se confronte à une approche sans âme. Cette incursion aux faux atours de survival animalier est aussi comique que pathétique. En guise de conclusion, il demeure néanmoins une histoire qui se distingue réellement du lot : « In a Twinkling ». Sur fond de science-fiction, les fêtes de Noël se parent d’un enlèvement extraterrestre digne de Twilight Zone. La singularité de l’ambiance, le contraste du noir et blanc (format 4/3) avec quelques notes de couleur, la dinde sucrée… Un style décalé et déconcertant qui se montre à la fois original et référentiel.
Des extraterrestres hauts en couleur !
Au final, All the Creatures Were Stirring est un film à sketches qui n’hésite pas à prendre des risques dans son approche du genre. Malheureusement, la disparité des histoires trahit de nombreuses inégalités. Errances narratives, problèmes de rythme, inutilité de certains pans, interprétations amateuristes… En plus d’un fil rouge pour le moins dispensable, on se retrouve avec trois récits médiocres qui, à leur manière, ressassent les défauts précités. Il demeure néanmoins deux intrigues aux qualités évidentes. Le travail sur le fond et la corrélation avec d’autres époques permettent de proposer des incursions curieuses, non dénuées d’intérêt dans leur mélange des genres et leur évocation de références élogieuses. Toutefois, trop peu pour conseiller ce métrage.
Un film de Rebekah McKendry, David Ian McKendry
Avec : Jocelin Donahue, Constance Wu, Graham Skipper, Amanda Fuller