Critiques spectateurs de Cheshire Hyde

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L'Etrange pouvoir de Norman

L'Etrange pouvoir de Norman

Petit succès pour le conte onirique et (presque) comtemplatif, Coraline, les studios Laïka Entertainment et Focus Features concoctent un nouveau long-métrage d'animation. Ecrit par Chris Butler, celui-ci y met toute son enfance vécue et ses passions personnelles. Assisté par Sam Fell, le film est réalisé en stop-motion et bénéfie aussi du traitement 3D. Rappelons le scénario : Norman Babcock est un petit garçon incompris de tous. Dépressif et toujours remis en question, il a la capacité de communiquer avec les êtres morts demeurant dans le monde des vivants. A la fois risée de l'école et de sa famille, il va devoir s'assumer et prendre son indépendance. Ainsi, commence une quête initiatique au coeur de sa banlieue américaine envahie soudainement par une horde de zombies réveillés de leur sommeil. Vendu comme un film d'horreur pour enfants, le long-métrage met en scène davantage un enfant au mal-être perpétuel qu'une parodie fugace des histoires de zombies. En effet, le début de l'histoire est un morceau de drame familial, où on assiste aux mésaventures de ce garçon rejeté parmi les siens. Peu à peu, l'intrigue se met en place tout en prenant son temps. Car les réalisateurs veulent avant tout s'attacher sur ce personnage principal timide et renfermé. Ainsi, le début du film se caractérise par son atmosphère triste et attachante, avec un humour à la fois enfantin et adulte. Tant de contrastes sont aptes à rendre le spectacle curieux. Puis, cet enfant rejeté si charmant avec ses amis décédés, qui paraissent plus naturels que l'entourage de la ville, gagne son importance en se retrouvant malgré lui dans une intrigue fantastique qui frôle l'horreur. Le milieu du film est reflété à peu près dans sa promotion : une déferlance titanesque de scènes gothiques et folles. Là, nous nous retrouvons avec un pur slasher movie ironique et référencé en tout genre (Scoubidou, Scream, Goonies, etc.), où les zombies sont ce qu'ils sont mais ridiculisés gentiment. Toutefois, le film n'oublie pas de se concentrer sur les relations grandissantes entre Norman et son entourage, prenant conscience de sa sincérité. Finalement, l'histoire surprend dans sa dernière partie, où les réalisateurs, après avoir aligné les codes de la comédie d'horreur (les stéréotypes attachants et caricaturales, les zombies primaires, la foule en colère, l'ombre du monstre planant), décident de déstructurer ces clichés connus sous une forme nouvelle et plus intime. Et c'est là que le film délivre un message hallucinant, car profondément beau et purement sincère. Il met en avant si poétiquement la critique de la peur des apparences, des dérives du rejet, de la perte d'amour pur à cause d'un manque de communication flagrant. ParaNorman se transforme en fable baroque et innocente, qui rappelle à chacun l'importance de la tolérance envers autrui et les conséquences de la perte de reconnaissance. Au-delà de la comédie horrifique pour tous publics (mais pas destinée aux plus jeunes), ce long-métrage, maîtrisé par une performance visuelle et lumineuse extraordinaire qui rappelle les oeuvres de Mario Bava, tire toute sa force de ce message universel si parfaitement illustré. Malgré des dialogues surlignés, le film réussit aussi bien techniquement qu'émotionnellement parlant : la 3D est utilisée cette fois à bon escient pour profiter de la beauté esthétique de l'animation fabuleuse et le spectateur se trouve ému par un fond poétique et triste. Bénéficiant d'une sortie mal gérée selon moi (il aurait mieux marcher vers la période d'Halloween, le si bien nommé ParaNorman est une oeuvre tellement humaine et sensationnelle pour chacun, tant ses thèmes (proches du cinéma de Burton) et son invitation à la tolérance concernent tout le monde. Un spectacle simple, merveilleux et émouvant qui ne laissera personne indifférent, de la part d'un studio indépendant Laika décidément prometteur.

7

Publié le 25 Août 2012

Alice

Alice

Jan Svankmajer st un réalisateur tchèque connu pour ses prouesses artistiques en animation image par image. Il décide en 1988 de livrer sa propre vision des livres indissociables de Lewis Carroll : Alice au Pays des merveilles et De l'autre côté du Miroir. Si cette histoire désormais classique est passé par tous les médias, du film au théâtre, il en résulte différentes versions, comme celle de 1933 rappelant un Magicien d'Oz de la même époque qu'un film d'animation célébre de 1951 (1951) largement plus chatoyant. L'adaptation parfaite de cette oeuvre littéraire est considérée comme impossible, car l'histoire, se basant sur le rêve et l'imaginaire d'une petite fille, ouvre différentes voies sur la créativité du metteur en scène.

L'idée nouvelle proposée par Svankmajer est de symboliser le Pays merveilleux par la chambre d'Alice, et en cela ses habitants sont représentés par les objets appartenant à la petite fille. Respectant l'esprit du roman (instropection dans le subconscient d'une enfant), cette idée est brillante non seulement par son ouverture à la créativité (les personnages faits de bric et de broc) mais aussi par les messages envoyés (la rebellion des jouets contre leur possesseur, l'enfermement mental). Doué grâce à un sens de l'inventivité esthétique, le cinéaste fait passer une ambiance froide, bizarre et pittoresque. Evitant la transposition simple de l'histoire, le film essaie de retenir toute l'essence du matériel original tout en ayant sa propre identité. Elle est caractérisée par un rythme lent, répétitif et presque intriguant. Contée par la bouche d'Alice, l'histoire s'enchaine avec une atmosphère en apparence vide et ennuyeuse, mais se révélant en fait presque malsaine.

Oeuvre curieuse et atypique, le "Alice"(/b] tchèque est un petit bijou d'inventivité, rendant honneur aux romans et délivrant une richesse profonde encore jamais vue, son ambiance se détachant de la joie musicale livrée par Disney ou de la peinture mélancolique livrée par Tim Burton.

9.6

Publié le 17 Juillet 2012

Vincent

Vincent

Tim Burton, avant d'être le réalisateur atypique que nous connaissons, était un jeune élève plutôt dissipé dans la société Disney. Ayant des difficultés à s'adapter au mode de travail de l'entreprise, il impose ses idées personnelles, qui aboutiront à la création de courts-métrages. D'abord prévu en livre, Vincent est la première production professionnelle de Burton. Mal vu par les producteurs de Disney, cette oeuvre pose les étapes d'un univers unique, essentiellement visuel et thématique.

Racontant les tribulations d'un jeune garçon de banlieue pavillionnaire se prenant pour Vincent Price dans son imagination, ce court-métrage n'est ni plus ni moins qu'une auto-biographie sur l'enfance du réalisateur. L'enfant mélancolique aux cheveux hirsutes, caché à l'intérieur d'une bouille innocente, est la personnification de son créateur. Ainsi, il n'est pas surprenant de voir des petits hommages à Edgar Poe, Frankenstein et autres Caligari. Toute l'ambivalence esthétique et profonde de ces classiques de l'horreur se retrouve dans chaque seconde de cette oeuvre. Les figures baroques et grotesques, les contrastes visuels étranges et l'atmosphère incongrue de l'industrie Hammer & Universal sont synthétisés harmonieusement en six minutes. Vincent Malloy, autoportrait à peine romancé de Burton, est le personnage caractéristique de ces productions : un enfant qui vit dans le mal-être et n'arrive pas à contrôler ses émotions, tour à tour attendrissant, effrayant et pathétique. Figure complexe des "films de chevet" de Tim Burton, le spectateur assiste par ailleurs à la plus belle déclaration d'une passion vouée au charismatique Vincent Price, ici narrateur. Sa voix funèbre et chantante complète ce portrait à la fois si doux et si dur.

Tim Burton résume à la fois ses passions et les thèmes fondateurs de son univers : l'attachement à un monstre en quête d'identité, la question de la différence, le manque de repères des valeurs, la poésie lyrique qui a un goût amer dans la bouche. En outre, Vincent est une oeuvre à initier dans l'étude de ce cinéaste, tant elle synthétise à merveille toute la substantifique moelle de son imaginaire visuel et thématique.

9.23077

Publié le 17 Juillet 2012

Devinez le film par sa tagline :

Hypnotized! Reincarnated as a monster from hell!
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