Resident Evil Degeneration
Au cinéma, la saga Resident Evil est loin de faire l’unanimité. Hormis un premier opus passable et un troisième volet intéressant dans sa déclinaison post-apocalyptique, la genèse initiée par Paul W.S. Anderson a progressivement sombré. En parallèle, le spectateur a eu droit à des films d’animation coproduits par Capcom. Ce qui laisse sous-entendre une bonne maîtrise de l’univers et un respect qui s’éloigne des velléités américaines en la matière. Malgré une visibilité limitée en tant que DTV, Resident Evil Degeneration n’a rien d’un spin-off. Bien au contraire, il fait le lien entre les opus vidéoludiques, sorte de chaînon manquant entre le quatrième et cinquième volet.
En ce sens, on retrouve des personnages connus de la saga, notamment Leon S. Kennedy et Claire Redfield. On évoque également les faits qui ont précédé la présente intrigue et les trajectoires divergentes que les deux protagonistes ont empruntées. Le background reste bien amené et globalement intelligible pour les spectateurs qui ne seraient pas familiers avec les jeux. Toutefois, il est conseillé d’avoir parcouru le deuxième et troisième opus pour saisir toutes les allusions et subtilités. Au-delà de leur relation, les évènements liés à la destruction de Racoon City et la fin d’Umbrella constituent des éléments-clefs dans le développement de Resident Evil Degeneration.
Faute de quoi, il est vrai que l’on pourrait considérer l’histoire comme un prétexte commode pour se confronter aux morts-vivants. On notera néanmoins des efforts consentis sur le contexte. Celui-ci profite d’une portée internationale soutenue par des actes de terrorisme et des expériences à l’échelle de la planète. Un virage déjà initié avec Resident Evil 4 et qui se confirmera avec les deux opus suivants. Le fait d’offrir une dimension géopolitique, toute modeste soit-elle, permet de rendre les enjeux plus intéressants. On évoque alors des problématiques contemporaines telles que les armes biologiques, ainsi que leur acquisition et leur usage par des gouvernements plus ou moins légitimes.
Autre point positif : le rythme. L’ensemble est dynamique et corrobore, là encore, l’évolution des titres de l’époque vers l’action au détriment de l’horreur pure. De même, les munitions pleuvent et les personnages sont rarement en danger, eu égard à leur condition physique presque surhumaine. On aime ou pas, cette approche tonitruante. De plus, les environnements restent bien exploités et savent se servir des jeux de lumière autant que de la configuration des lieux. La partie dédiée à l’aéroport s’inspire des fondamentaux du survival, tandis que la seconde moitié du métrage met l’accent sur la découverte d’un laboratoire secret. On a donc le terrain d’expérimentation et les lieux de recherche afin de présenter une continuité pertinente dans l’intrigue.
Comme évoqué précédemment, le récit reste assez linéaire, et ce, en dépit d’un fond assez fouillé pour les amateurs de Resident Evil. L’ensemble se suit sans déplaisir, mais n’apporte rien à la genèse de la saga. C’en est tellement flagrant que son intégration dans la chronologie globale n’a quasiment aucune incidence et, répercussion à la fois positive et inattendue, ne souffre d’aucune incohérence, encore moins de décalage. On se retrouve donc dans un fan service mesuré où la narration hésite constamment entre une tonalité référentielle et une intrigue accessible aux novices. Si l’ensemble demeure simple à comprendre, il en ressort un atermoiement palpable pour contenter deux publics différents.
Quant à la technique, le métrage accuse le coup. Pour l’époque, on peut apprécier la qualité du travail réalisé, même si sur le plan visuel, il se révèle inférieur à Final Fantasy VII – Advent Children ; de deux ans son aîné. Le cadre reste bien retranscrit, la mise en scène est correcte, mais ce sont surtout les personnages qui souffrent de la comparaison. Tout en considérant les performances en images de synthèse en 2008, les animations sont d’une rigidité alarmante. On pense aux corps monolithiques, aux cheveux figés, aux expressions faciales ou à ces regards auxquels il manque une véritable étincelle. Acceptable au moment de sa sortie, la direction artistique vieillit plutôt mal.
Au final, Resident Evil Degeneration est un film d’animation qui se révèle davantage proche et respectueux des jeux vidéo de Capcom que son pendant cinématographique américain. On apprécie quelques connotations géopolitiques et des éléments propres au bioterrorisme pour interpeller le spectateur, notamment sur l’éthique des recherches scientifiques. Pour autant, le scénario s’écartèle entre fan service et simplicité de narration pour toucher un public plus large. Si le rythme ne souffre d’aucun écueil, on peut néanmoins remarquer des faiblesses plus ou moins évidentes en ce qui concerne des relations statiques, dénuées d’émotion. À cela s’ajoute une technique datée quant à la modélisation des personnages. Une initiative divertissante, mais sans grande conséquence (positive ou négative) dans la genèse de Resident Evil.
Un film de Makoto Kamiya
Avec : Paul Mercier, Rick Marcus, Laura Bailey, Roger Craig Smith