Voir la fiche complète du film : Pyramide (Grégory Levasseur - 2014)

pyramide - Critique

Première réalisation de Grégory Levasseur, proche collaborateur d'Alexandre Aja, Pyramide pose un concept relativement original par rapport aux thèmes que le cinéma fantastique exploite de nos jours. Malheureusement, le contexte égyptien se limite à beaucoup de déjà-vu et ce qu'il y a de véritablement original déçoit quelque peu par un manque d'aboutissement.

Publié le 26 Mai 2015 par Oeilsansvisage
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*** Attention spoilers ***

Aout 2013, alors que le Caire sombre une nouvelle fois dans le chaos, une équipe d’archéologues américains constituée d’un père, sa fille et son fiancé, fait une découverte majeure dans le désert égyptien en initiant l’excavation d’une pyramide entièrement ensevelie. Cette dernière a la particularité de n’avoir que trois faces et sa base située profondément sous le niveau de la surface indique une taille et une ancienneté qui remettent en cause toutes les connaissances acquises dans le domaine de l’égyptologie. Malgré le caractère exceptionnel de la découverte, l’université qui finance les fouilles ordonne le repli immédiat, craignant pour la sécurité de ses compatriotes à cause des évènements qui secouent le pays. Bien que le site se trouve loin de l’épicentre des violences, l’équipe est contrainte d’abandonner le campement, soumise à l’autorité de l’armée égyptienne qui encadre les recherches. Alors que le départ est prévu pour le lendemain matin, l’équipe entend utiliser le peu de temps qui reste pour explorer au maximum ce qui pourrait être la découverte du siècle.

Aux archéologues s’ajoutent une journaliste et son cadreur venus couvrir l’évènement. L’exploration se fait dans un premier temps grâce à un robot téléguidé à distance, spécialement conçu par la NASA pour ce genre d’opération. Celui-ci entre par un tunnel remontant à la surface, bizarrement creusé depuis l’entrée de la pyramide située plus bas sous terre. Le robot s’avance sans problème jusqu’à l’entrée du bâtiment enseveli mais, une fois à l’intérieur, il est victime d’attaques d’origine inconnue qui entrainent rapidement la rupture de transmission avec l’extérieur. Décidés à poursuivre l’exploration, les cinq personnages se préparent à descendre pour retrouver le robot qui représente un bijou de technologie et une fortune dont la perte n’est pas envisageable. Après avoir pris leurs précautions pour pouvoir retrouver le chemin de la sortie, le groupe s’engouffre vers l’inconnu.

Fascinés par ce qu’ils découvrent, les explorateurs se laissent vite emporter par la curiosité et, s’enfonçant un peu trop profondément, ils se retrouvent pris au piège lorsqu’ils se rendent comptent que le câble qui les reliait à l’extérieur a été sectionné. Forcés de s’engager dans un dédale de couloirs labyrinthiques, leur sort bascule définitivement lorsque le sol s’effondre sous leurs pieds alors qu’ils viennent de retrouver le robot en charpie. Dès lors, une menace de plus en plus pesante se fait ressentir, poussant les cinq aventuriers à devoir s’enfoncer toujours plus profondément au cœur de la pyramide pour tenter de trouver une issue. On assiste à une succession de péripéties où les pièges et les habitants surnaturels de la pyramide se chargent de réduire peu à peu le nombre de participants à cette sinistre excursion. Si les décors sont parfaitement crédibles et donnent l’illusion d’être plongé dans un de ces lieux ancestraux et emplis de mystères, les maléfices qui l’habite ne sont pas à la hauteur de ce que l’on serait en droit d’attendre dans une pyramide aussi spéciale: couloir se remplissant de sable, fausse remplie de pieux acérés et passages ramenant à un point de départ sont des pièges un peu décevant. Les scarabées de l’excellent La momie version 1999 sont remplacés par des chats zombis et, outre cette redéfinition de casting des forces du mal, c’est n’est que lors de la séquence finale que la dimension hors norme attendue intervient.

Parvenant dans une chambre mortuaire, les derniers survivants sont attaqués par un monstre qui contre tout attente n’est pas une momie mais le dieu Anubis en personne! D’après ce que disent les hiéroglyphes gravés sur les parois, cette figure humanoïde à tête de chien (ou de chacal) aurait été enfermée dans ce tombeau par les égyptiens de l’antiquité pour se soustraire à son pouvoir. En arrivant dans la pièce, les héros découvrent le cadavre partiellement momifié d’un homme vêtu de façon moderne qu’ils identifient comme étant franc-maçon d’après la chevalière qu’il porte au doigt. Ils trouvent aussi son journal qui leur fait comprendre que le tunnel sous terrain menant à l’entrée de la pyramide était l’œuvre des membres de la société secrète. La façon dont ces explications sont produites n’est pas très subtile et donne l’impression d’un scénario grossièrement ficelé. Anubis est montré par l’intermédiaire de la caméra qui le film en vision nocturne pour ne pas attirer son attention, exactement comme procédait la séquence finale de [REC], sans pour autant parvenir à reproduire l’intensité de ce grand moment de terreur cinématographique. Cette première représentation de la créature parvient néanmoins à donner un certain souffle à l’action mais celui-ci s’estompe quasi-immédiatement lorsque la fille du professeur d’archéologie, dernière survivante, est rattrapée par son Némésis qui l’attache à un poteau et se révèle à la lumière de la caméra qu’elle porte autour du cou. On découvre ainsi la bête en gros plan, ce qui permet d’observer son design en détail, mais efface du même coup son aura mystérieuse pour laisser place à la vision décevante d’une modélisation en images numériques sans saveur.



La mise en scène joue sur l’effet «caméra à l’épaule» pour immerger le spectateur au cœur de l’action. L’utilisation de cet effet est justifiée par la présence de la caméra de télévision qui accompagne les personnages dans l’aventure. Celle-ci est mise en parallèle avec celle du robot qui devient le point de vue principal durant la séquence où il s’introduit dans la pyramide. Cependant, d’autres points de vue sont ajoutés à ceux des caméras diégétiques pour donner plus d’ampleur à la mise en scène. Au fur et à mesure que les personnages s’enfoncent dans les entrailles de la pyramide, le point de vue dominant de la caméra TV est progressivement dissolue avec ceux des personnages dont les vues subjectives deviennent spontanément d’autres sources de l’image. Cette dissolution opportuniste du point de vue filmique fait qu’on ne sait plus toujours d’après les yeux de quel personnage l’action est montrée. Si ce procédé ajoute à l’intensité de la mise en scène, il en diminue également le sens. Pour Grégory Levasseur, dont c’est le premier long-métrage en tant que réalisateur, la recherche des effets de sursauts prime et tous les moyens sont bons pour y arriver, quitte à perdre toute cohérence esthétique.

Malgré un concept intéressant sur le papier: un récit d’aventure fantastique lorgnant vers l’horreur dans un contexte égyptologique avec toutes les possibilités narratives qui en découlent, Pyramide n’a pas l’audace d’aller aussi loin qu’il aurait pu le faire. L’aboutissement du concept posé par le film réside dans l’apparition du dieu Anubis, mais là encore la présence d’un tel personnage n’est pas exploitée à sa juste valeur et est reléguée au stade d’un monstre dont la fonction est de piéger et de terroriser les pauvres bougres qui tombent malencontreusement dans son antre. Bien qu’Anubis soit partiellement remis dans son contexte mythologique: il arrache le cœur de ses victimes pour le peser sur une balance et établir le jugement de leur âme qui est envoyée au paradis ou en enfer - cette référence n’aboutit sur rien de plus que la mutilation et les effets gores. Outre les différentes versions de La momie, on pense à Stargate où la mythologie égyptienne était mise en valeur par le récit (bien que dénaturée) et donnait lieu à un spectacle jouissif, qui penne à apparaître dans Pyramide. Il est évident que ces deux films jouent dans des registres différents du fantastique et que leurs budgets respectifs sont incomparables, mais cela ne change rien au traitement de la question mythologique, malheureusement sous-exploitée dans le film de Gregory Levasseur. On regrette aussi le fait que la contextualisation historique de départ ne soit qu’un prétexte sans aboutissement narratif autre que l’intrusion urgente dans la pyramide. C’est peut-être là que les dimensions mythologique et politique auraient pu se rencontrer et engendrer une histoire autrement plus profonde et originale.

Produit par Alexandre Aja, dont il a confié la réalisation à un de ses collaborateurs de longue date, Pyramide montre une fois de plus que les talents français du cinéma fantastique et d’horreur trouvent plus d’écho à l’étranger que dans leur pays d’origine. Si ces genres ont connu un pic de popularité en France durant la décennie 2000, cela semble déjà être un phénomène du passé malgré d’excellentes sorties ces dernières années comme par exemple L’étrange couleur des larmes de ton corps ou Goal of the dead. Les réalisateurs étant à l’origine des films marquant des années 2000 succombant les uns après les autres à l’appel du chant des sirènes de la production internationale, nous en appelons aux derniers restants: le cinéma d’horreur français compte sur vous !

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