Devil Seed
Alexandra emménage avec deux amies étudiantes dans une nouvelle demeure, plus grande que la précédente. Eprouvée par un été difficile passé au chevet de sa grand-mère, gravement malade, elle attend avec impatience la reprise des cours et savoure ses retrouvailles avec son petit ami.
Toutefois, après un passage chez une diseuse de bonne aventure, Alexandra est témoin puis victime d'événements étranges dans la maison.
Depuis l'Exorciste, le film de possession fait partie intégrante de l'univers horrifique. Cependant, les exemples de réussite sont plutôt rares, ce sous-genre peinant à s'exprimer en dehors du chef d'oeuvre intemporel de William Friedkin. Néanmoins, les succès critiques et commerciaux de l'Exorcisme d'Emily Rose et d'Insidious ont relancé dernièrement ce thème.
Pays en pleine croissance cinématographique, le Canada tente depuis quelques années, avec ses moyens, de proposer une variante honorable à son géant voisin hollywoodien. Devil Seed est le premier long-métrage de Greg A. Sager, qui a également co-signé, produit et monté ce film, que l'on peut donc considérer comme un projet personnel.
Composé d'inconnus, le casting est jeune, mais à la différence des habituels teen movies, les personnages sont plus travaillés, même s'ils n'évitent pas certains clichés (la blonde nymphomane aux seins siliconés, le petit ami menteur, la copine fêtarde). D'ailleurs, le début du métrage ne se différencie en rien des productions américaines lambda.
Une fois la scène avec la bohémienne passée, le film s'extirpe toutefois en douceur de cet univers banal pour nous plonger dans un huis clos plutôt soigné, dont la crédibilité doit beaucoup à son interprète principal.
Michelle Argyris, qui débute ici sa carrière au cinéma, tient en fait une bonne partie de Devil Seed sur ses épaules. Convaincante en jeune femme vertueuse débordée par des événements qui dépassent l'entendement, elle est aussi très crédible en créature possédée, surtout durant les premières nuits de terreur. Son regard noir et froid comme la glace, accentué par cette chevelure brune opaque qui fait obligatoirement penser aux fantômes japonais de Ring et The Grudge : Michelle Argyris sait indéniablement attirer l'objectif.
Mannequin à ses heures perdues, elle dispose d'une sensualité qui s'oppose davantage à son personnage de base qu'au démon désireux de l'enfanter. Cette ironie est accrue lorsque l'on apprend qu'Alexandra est encore vierge, et que cette pureté rare attire sur elle le Malin plutôt que Dieu.
Passés les effets de lévitation et les marques corporelles habituels, le démon prend définitivement le dessus sur la personnalité de la jeune fille, et c'est à ce moment précis que le film bascule sans qu'on s'y attende dans une pâle copie du film de Friedkin.
Du prêtre fatigué aux vulgarités et autres propos tendancieux exprimés par le démon, en passant par les positions scabreuses adoptées par celui-ci et le meurtre en règle de la blonde qu'on attendait depuis un bon moment, rien ne nous sera épargné par un réalisateur copycat, visiblement bien trop imprégné de l'Exorciste.
En quelques minutes, l'honnête suspense fantastique se transforme ainsi en grotesque mascarade, sensation que l'épilogue ne fera qu'amplifier.
Survivant dans une sorte de coma propice au Diable, Alexandra ira donc au bout de sa grossesse, l'enfant démoniaque étant déjà adopté par un gentil petit couple (mise en place d'une possible suite en cas de succès du film).
Prometteur avant de tomber dans la copie éhontée d'un classique du genre, Devil Seed ne mérite pas qu'on s'y attarde plus que de raison, malgré le charme et le talent de Michelle Argyris, que l'on espère revoir prochainement dans un projet plus ambitieux.
Pour les amateurs de films d'exorcisme, autant se consoler avec les grands classiques et oublier rapidement cette oeuvre décevante et excessive.
Un film de Greg A. Sager
Avec : Michelle Argyris, Shantelle Canzanese, Vanessa Broze, Kevin Jake Walker