Paperhouse
Pas très accueillant tout ça !
Malheureusement, la petite tombe bien malade et ses rêves deviennent de plus en plus nombreux et terrifiants. Elle se lie alors d'amitié avec Marc, le jeune garçon qu'elle a dessiné et qui existe vraiment, mais qui reste très gravement malade à cause d'une dystrophie musculaire. Elle va donc essayer de l'aider au travers son dessin et ils vont tenter d'échapper à ce père aveugle et en colère.
Paperhouse, sous ses airs de film fantastico-horrifique, cache en fait plusieurs niveaux de lecture et s'attache à nous montrer le gouffre qui se trouve entre l'enfance et le monde adulte.
On retrouve cette différence dans plusieurs niveaux, comme ces deux jeunes filles qui se maquillent pour faire les grandes, et qui parlent de flirt, pour finir par jouer à cache-cache, ou encore lorsque la jeune fille parle à sa mère de façon désinvolte pour finir pour s'endormir avec son ours en peluche. Toutes ces scènes sont assez équivoques et montrent bien la grande différence entre ces deux âges et la difficulté de passer de l'un à l'autre. L'autre point travaillé concerne la relation enfant/adulte et notamment la relation père/fille, qui est altérée par la distance. Ces deux êtres doivent apprendre à se retrouver et on voit que ce n'est pas une chose facile. La puissance de Bernard Rose est de traiter de cela dans des tons assez graves, mais plutôt simples et sans tomber dans le pathos et c'est très agréable. On pense facilement à Créatures Célestes de Peter Jackson ou Les Noces Rebelles de James Gray dans des tons graves, mais simples. L'apparition du fantastique est comme une porte de sortie pour la jeune fille, son espèce de jardin secret, qui va virer au cauchemar à cause de son passé et de ses doutes, avec son père qu'elle considère presque comme un inconnu. On voit une grande différence entre le monde réel et son monde à elle, car certaines choses font très fausses, comme la maison ou les fruits du jardin, mais cela fait partie intégrante de son dessin et de son imaginaire et Bernard Rose arrive à faire passer ce sentiment de manière très adroite.
Ne t'inquiète pas chérie, on va faire quelque chose pour ces cheveux !
C'est d'ailleurs assez étonnant qu'elle n'ait pas plus percé par la suite. Ne voulant pas rester dans ce milieu -le tournage s'étant révélé bien trop éprouvant pour elle-, elle est depuis mariée, mère et exerce la profession d'avocate. Elliott Spiers incarne le jeune garçon, Marc, atteint de dystrophie musculaire et il est lui aussi très bouleversant. Jouant dans un registre beaucoup plus grave, il est extrêmement touchant et on se prend très rapidement d'amitié pour lui. Une scène-clef du film se révéla étrangement prophétique, puisque atteint d'importants troubles psychologiques, il se défenestrera en 1994.
Les rôles adultes tenus par Gemma Jones (Harry Potter, Oh My God !) et Glenne Headly (Dick Tracy, Time Code) sont très convaincants et on sent un vrai travail dans la direction d'acteurs. La fin demeure un peu plus risquée, notamment par un parti pris par Bernard Rose et qui peut être considéré comme abracadabrant. Néanmoins, il a le mérite de poser les bonnes questions sur les intentions finales de la jeune fille et fini de manière assez poétique le métrage.
Au final, Paperhouse est un très bon film, une belle réussite que Metropolitan nous permet de redécouvrir aujourd'hui. Possédant plusieurs niveaux de lecture, très touchants, très subtils et arpentant le chemin sinueux du passage de l'enfance à l'âge adulte, Bernard Rose a le mérite de faire un film qui s'adresse à tout le monde et qui n'a pas de thème précis. On appréciera d'autant plus cette galette grâce aux bonus présentés par Metropolitan comme un entretien avec Bernard Rose autour du film, mais surtout un entretien passionnant de passionnés avec Pascal Laugier (Saint-Ange, Martyrs, The Secret) qui décrypte le film de manière incroyable.
Un film de Bernard Rose
Avec : Charlotte Burke, Jane Bertish, Samantha Cahill, Glenne Headly