L'homme au masque de cire
Un remake pour le moins réussi qui tire le meilleur parti des atouts de la version de 1933. Davantage axé sur l’épouvante que sur la présence saugrenue de la comédie ou du film de gangsters, L’homme au masque de cire occulte la majorité des écueils de son prédécesseur.
Pour des raisons de qualité et d’opportunisme, on a tendance à rejeter les remakes, basses initiatives mercantiles peu inspirées. Pourtant, le procédé a pour volonté de proposer un regard différent sur une histoire particulière, en y apportant quelques ajustements pour la «moderniser». Les véritables réussites, celles où le remake est supérieur à son modèle, sont rares, mais elles existent bel et bien. L’exemple le plus représentatif demeure The Thing. Moins connu, Masques de cire de Michael Curtiz possédait un certain charme; bien que de nombreux écueils l’empêchaient de se hisser au statut de classique de l’épouvante. Le remake d’André de Toth parvient-il à rectifier le tir?
Concernant la version de 1933, on lui reprochait principalement un mélange des genres inopportuns qui prenaient le pas sur l’épouvante et le thème principal. Il en ressortait une progression inconstante, favorisant les digressions et les personnages caricaturaux. Pour le reste, il est vrai que l’ambiance, les décors et l’idée initiale disposaient d’un fort potentiel pour que la Warner concurrence les autres grands studios de production. L’homme au masque de cire emprunte sensiblement un schéma narratif identique. À savoir, le parcours d’un artiste teinté de folie et de passion pour accomplir sa vengeance envers son agresseur et la société.
L’on ne retrouve pas forcément l’atmosphère gothique de l’entame originale qui tient ici à davantage de sobriété. Malgré le décalage temporel entre la séquence d’introduction et la suite de l’histoire, le contraste est moins flagrant, mais n’en demeure pas moins de qualité. Si la surprise du scénario ne fait plus l’ombre d’un doute, l’approche peaufine ses éléments principaux. Par exemple, en avançant de façon plus crédible le final par le biais de quelques incursions dans le sous-sol du musée. Passage qui arrivait de manière trop abrupte auparavant. On se trouve donc en terrain connu avec une progression respectueuse du matériau de base. Ce qui n’empêche nullement d’être conscient des écarts du film original.
Sur ce point, l’intrigue gomme les scories que l’on pouvait reprocher à Masques de cire. À savoir, un dilettantisme évident dans son développement soutenu par une galerie d’intervenants passablement agaçants et surfaits. On occulte à dessein le mélange comico-romantique et policier qui se montrait maladroits et faisait perdre de vue le côté horrifique du récit. Les scénaristes ont également travaillé sur la caractérisation afin de présenter des personnages autrement plus pragmatiques et crédibles dans leur réaction. Seul l’antagoniste conserve sa vision tourmentée de l’existence, Vincent Price succédant à merveille à Lionel Atwill.
Le fait de recentrer le film sur son intérêt premier permet d’apprécier ce que l’on attendait du métrage de Michael Curtiz. On se focalise uniquement sur les codes de l’épouvante en jouant de suspense et d’atmosphère lugubre pour étayer le tout. Il est vrai que l’usage de la 3D reste parfaitement anecdotique et ne se révèle qu’une plus-value commerciale au regard de la brièveté des passages concernés. Pour autant, l’immersion ne compte guère sur cet artifice pour emporter le spectateur. La finesse des décors et la fluidité de la progression fait s’alterner les séquences intérieures (principalement dans le musée) et extérieures (avec des environnements urbains retranscrit avec justesse).
Au final, L’homme au masque de cire sublime le matériau original. La version de 1953 réussit à exploiter toutes les qualités du film de Michael Curtiz en l’adaptant à un public plus ciblé. On oublie donc une évolution trop bavarde et digressive pour se concentrer sur le musée de cire et les mystérieuses disparitions qui l’entourent. On apprécie davantage l’ambiance à sa juste valeur. Les composantes de l’intrigue se voulant moins éparses et mieux maîtrisées. Il en ressort un remake convaincant qui surpasse son modèle. En cause? Une excellente assimilation des codes de l’épouvante et une approche plus pragmatique.
Un film de André De Toth
Avec : Vincent Price, Phyllis Kirk, Charles Bronson, Frank Lovejoy