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Horns - Critique

Depuis Piranha 3D, Alexandre Aja semble s'orienter vers un fantastique de plus en plus grand public. La preuve en est le choix de Daniel Radcliffe, alias Harry Potter, pour incarner le personnage principal. Il ne faut toutefois pas trop vite juger cette fable fantastique qui a son lot de qualités.

Publié le 27 Février 2015 par Oeilsansvisage
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Adaptations de romans ou de nouvelles

*** Attention spoilers ***

Un jeune homme accusé d’avoir assassiné sa petite amie se voit pousser une paire de cornes sur la tête. Cherchant à prouver son innocence, il va devoir passer à travers la colère des habitants de la ville et apprendre à gérer ses nouveaux pouvoirs.

Niché au milieu des montagnes, une bourgade rurale en apparence paisible fait le deuil d’une jeune fille morte dans des conditions tragiques. Son copain, Ig Perrish, lui aussi très touché par le décès, doit cependant subir les affronts de la localité qui l’accuse d’être le meurtrier sans en avoir la preuve. Noyant son chagrin dans l’alcool, Ig perd le contrôle un soir alors que les proches de la victime se sont réunis dans les bois, à côté de la cabane où le couple avait l’habitude de se rencontrer. Juste après leur départ, ivre et frustré, il piétine rageusement une statuette de la Vierge Marie posée à l’endroit où fut retrouvé le corps avant de pisser sur les bougies et les fleurs disposées à côté. Perdu par sa rancœur, il finit la nuit avec une amie mais lorsqu’il se réveille le lendemain matin, il est troublé par une douleur au front qui se confirme par la présence de deux petites protubérances semblant vouloir sortir de son crâne. Sa surprise est d’autant plus grande que les personnes à qui il est confronté ne relèvent pas immédiatement cette nouveauté.



En plus de cette métamorphose physique, Ig ne reconnait pas non plus le monde qui l’entoure. Les gens de son entourage qu’il connait si bien ont des attitudes étranges et n’hésitent pas à lui confier des choses reflétant la part la plus sombre de leur esprit. Alors que les cornes lui poussent de plus en plus, Ig comprend qu’il subit une sorte de malédiction qui, si elle a le bénéfice de lui faire voir des choses dont il est le seul témoin, agie aussi comme une sorte de vecteur diabolique qui provoque des catastrophes en libérant le mal contenu chez ceux qui l’entourent. Ce châtiment à double tranchant va se révéler être autant un atout qu’une tare. Le héros va alors se lancer dans une quête initiatique où chaque nouvelle rencontre l’amène un peu plus près de la vérité, tout en ayant son lot de souffrances. Entre sa famille, ses amis et les gens de la ville, Ig perd peu à peu pied dans un univers qui se déforme sous ses yeux.



Sa souffrance face à la situation dramatique qui l’accable est accentuée par l’obscénité que les habitants de la ville expriment lorsqu’ils lui adressent la parole. Ig, se retrouvent ainsi au cœur d’un tourment où tout est réduit à des idées de violence et d’obsession sexuelle. Celles-ci se manifestent concrètement, parfois de façon absurde comme quand les journalistes harcelant Ig se mettent à se battre après qu’il leur ait dit qu’il donnerait son interview au vainqueur du combat. C’est aussi à travers un humour grotesque que ces pensées sous-jacentes s’expriment, par exemple quand les policiers jouant les terreurs s’avouent mutuellement leurs penchants homosexuels de la manière la plus crue. A travers cette norme qui s’établie progressivement, on assiste à une critique acerbe de la décadence morale de l’occident où l’adultère, l’envie et le meurtre deviennent des lois communes.


Récit métaphorique construit sur une symbolique religieuse, Horns fait appel au mythe du jardin d’Eden et de l’Ange déchu. Les cornes d’Ig Perrish sont le fardeau qu’il doit revêtir pour avoir trompé sa copine, ne serait-ce qu’une fois après sa mort, tandis que celle-ci le trompait déjà avec son meilleur ami. A l’image de la pomme rongée par le vers et pourrie de l’intérieur, l’idylle des deux amants a lieu dans le «jardin secret» où Ig et sa dulcinéese retrouvaient depuis l’enfance. Ce sera là aussi qu’aura lieu l’affrontement final entre le héros et son rival dans une séquence où de superbes effets spéciaux viennent finir d’illustrer cette fable fantastique. Ig, revêtant alors l’apparence d’un démon incandescent, invoque une horde de serpents, symbôle de Satan dans le jardin d’Eden, qui achèvent le meurtrier dans un pur moment d’horreur!

Pour son sixième long-métrage, Alexandre Aja confirme toujours plus sa maitrise de la réalisation et du même coup sa faculté à s’intégrer au système hollywoodien. Délaissant partiellement le genre de l’horreur avec lequel il s’est fait connaître grâce à Haute Tension et au remake de La colline a des Yeux, le français montre qu’il sait aussi s’illustrer dans un cinéma fantastique s’adressant à un public plus large. L’humour grand-guignolesque déjà présent dans Piranha 3D, trouve ici une saveur parfaitement en adéquation avec la descente aux enfers que connaît le personnage principal. Le choix de Daniel Radcliffe, égérie de la saga Harry Potter, convient très bien pour ce rôle de «tête à claque» persécutée par toute la communauté.



Si Horns peut en apparence rappeler les films fantastiques hollywoodiens destinés à un public adolescent comme Twilight, notamment à cause de son casting, l’obscénité qu’exprime l’entourage d’Ig et l’aspect malsain de l’histoire le font davantage pencher du côté de l’Amérique profonde des films de Rob Zombie. En revanche, le classicisme de la mise en scène et le soin apporté à l'esthétique auraient plutôt tendance à l'inscrire dans la veine des dernières réalisations de Sam Raimi. A noter que si Horns n’est pas un film d’horreur à proprement parler, il intègre certaines images qui le font occasionnellement basculer de ce côté. Pour des raisons différentes, ce film marque un tournant dans les carrières du réalisateur et de l’acteur principal, il s’agit de voir où cette nouvelle étape va les mener dans leurs projets futurs.

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