Carver
**Attention, cette critique contient des spoilers**
Deux frères rejoignent un couple d'amis pour un week-end à la campagne avant de reprendre les cours à l'université. En chemin, ils font la connaissance d'un barman qui leur propose de nettoyer sa grange en échange de quelques consommations gratuites le soir même. Ils acceptent, et découvrent sur place des films d'horreur qu'ils trouvent très réalistes, trop peut être...
Depuis 2000 Maniacs (1964), les culs-terreux adeptes de musique country ont inspiré moults cinéastes américains. Leatherface est à considérer en outre comme le père spirituel d'une bonne cuvée de tueurs dont la stupidité confondante n'a d'égale que la folie meurtrière.
Carver ne déroge pas à ce folklore local et semble l'assumer pleinement d'entreée de jeu, avec sa bande d'adolescents en guise de héros, paumés dans un lieu hostile habité par d'inquiétants personnages (le sheriff en tête).
Filmé avec un budget limité, Carver dénote un peu par une photographie initiale fort lumineuse (qui tranche avec l'ambiance supposée du métrage), et des personnages plus prononcés sur le plan émotionnel qu'à l'accoutumée, pendant que le fond sonore alterne entre une composition classique et un vieil air de country qui finira finalement par trouver sa place au sein de ce film.
La première moitié du métrage s'entend à nous présenter en détail les héros et les lieux du drame. La mise en scène est rigoureuse mais manque de rythme, de sorte que l'on finit par trouver le temps long, malgré la découverte des bobines qui commence à inquiéter certains personnages.
Heureusement, le ton change avec les premiers meurtres. Celui dans les toilettes extérieures du bar est concise, brutale et l'ellipse n'y est pas de rigueur. Des points positifs pour une castration dans les règles de l'art avec une arme de précision, filmée de manière chirurgicale dans un lieu infect et crasseux en totale osmose avec les agissements du tueur.
Ce tueur, souvent paré d'un casque ressemblant à celui d'un sidérurgiste, s'exprime mieux dans l'art de la torture que dans la vie. Son côté autiste peut parfois lui apporter une touche de sensibilité vite effacée par l'odieuse perversité dont il fera preuve tour à tour pour dégommer les cinq protagonistes.
Ainsi, la blonde de service terminera crucifiée avec un clou salvateur logée en pleine tête, tandis qu'une masse défoncera les os craquelants d'un des derniers rescapés dans une scène rendue intense par sa sauvagerie et son côté réaliste extrême, au son d'un morceau country devenu à son tour objet de malaise dans une seconde partie de film bien plus glauque et intéressante.
Ce sont en effet les scènes de tortures et de meurtres de la fin du film qui permettent à Carver de sortir un peu de l'anonymat des Direct-to-video inondant les marchés de la vidéo, plus que son tueur, un peu limité au niveau des conversations et du charisme, ou que sa mise en scène, somme toute assez conventionnelle. Les séquences de meurtres, tournées le plus près possible des personnages, s'avèrent être crédibles, gores et éprouvantes dans une certaine mesure.
Le dernier survivant comprendra trop tardivement qu'il faut être au moins deux pour tourner un snuff movie : un tueur devant la caméra, et un complice derrière. Ce dernier vengera le premier dans un épilogue tranchant dans tous les sens du terme, puisqu'il s'éloigne davantage de la banalité des métrages habituels en osant proposer un final réaliste, éloignant d'un revers de la main salvateur le sacro-saint happy end.
Film à petit budget inégal, poussif durant son démarrage, Carver est néanmoins appréciable pour l'aspect réaliste de certaines scènes trash, l'originalité des armes utilisées par le tueur et une interprétation correcte, évitant les clichés.
Un film de Franklin Guerrero Jr.
Avec : Matt Carmody, Kristyn Green, Stephen Rogers, Neil Kubath