Joker: Folie à Deux
Critiques spectateurs
Réalisateur: Todd Phillips Avec Joaquin Phoenix, Lady Gaga, Zazie Beetz, Steve Coogan, Brendan Gleeson, Catherine Keener, Jacob Lofland, Harry Lawtey, John Lacy, Leigh Gill, Bill SmitrovichInscrivez-vous ou connectez-vous pour ajouter votre avis !
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publié le 07/10/2024 - 18:03
La fin d'un mythe
Difficile de passer après le mastodonte cinématographique que fut "Joker", et pourtant son réalisateur, Todd Phillips, a tenté l'aventure pour nous offrir cette suite dont le principal intérêt est de déconstruire le mythe du Joker.
D'emblée je vous le dis, si vous vouliez voir plus de folie et de crime de la part d'Arthur Fleck vous serez déçu. Le film prend le parti étrange mais ingénieux de narrer la "romance" de Joker et Harley Queen via des séquences de comédie musicale et une approche surréaliste. Ainsi, le peu de violence manifestée par le Joker lui-même demeure de l'ordre de l'imaginaire. On peut être déçu par cette approche mais elle a du sens au vu du titre du film, il s'agit ici clairement de représenter les visions d'Arthur, mieux percevoir sa facon d'appréhender sa relation avec Harley Queen, et de comprendre le personnage de l'intérieur. Par contre, fini la subtilité sur la part de vrai ou de faux dans ce que vit Arthur au vu de la mise en scène.
Que dire de cette nouvelle version de Harley Quinn? Et bien, déjà il faut saluer la performance de Lady Gaga qui joue avec brio ce personnage qui est un miroir assez convaincant de la folie Joker sans néanmoins en atteindre la violence. Hormis le fait qu'elle soit pyromane, cleptomane et manipulatrice, on est loin du personnage de base mais j'apprécie un changement notable la concernant : Ici c'est elle qui influence le Joker et non l'inverse, un changement radical sur la relation Joker/Harley Quinn. Et si certains seront déçu par la finalité de cette relation, il faut rappeler qu'aucune version de la romance de ce couple n'est un happy end, il s'agit de deux personnages déséquilibrés psychologiquement avec une addiction à la violence, ça ne pouvait que mal finir.
Et bien sûr, le grand sujet qui fâche : La déconstruction du mythe du Joker. Car, oui, ce qui frappe ici c'est que le récit amène non plus l'ascension du Joker mais sa chute. On assiste ainsi à la captivité d'Arthur, les sévices et humiliations de la part de ses gardiens, sa manipulation par Harley Quinn, son engrenage dans une tourmente judiciaire où il est malgré lui un symbole. Tout le récit nous rappelle un élément important du premier film mais mal comprit : Arthur Fleck est une victime, victime de sa folie, des abus de la société à son encontre, de la folie de sa propre mère. Il n'est pas le criminel redoutable et ingénieux de sa version de "The Dark Knight", c'est un psychopathe fou qui agit par pulsions sans réfléchir aux conséquences de ses actes, loin donc du symbole social. Et le film nous le fait savoir à plusieurs reprises, notamment lors du fameux procès.
Le réalisateur a donc prit sur lui de rappeler ce qu'était son Joker, pas une figure qu'il faut adorer mais plaindre, pas un symbole mais un homme dans toute sa tragédie. En cela, je ne peux qu'approuver cette démarche courageuse et sincère. Ce n'est pas la suite spectaculaire que le public attendait mais c'est la suite dont il avait besoin.
Globalement, c'est donc une suite bien moins forte émotionnellement que son prédécesseur mais qui reste percutante dans son message et son audace narrative. A noter une intro animée assez jouissive.
Assez triste de ne plus revoir Joaquin Phoenix dans la peau de Arthur Fleck/Joker au vu de la fin de son personnage mais j'y vois une conclusion satisfaisante, rappelant que le Joker est plus une idée qu'un homme.