The creature below
Lorsqu’on évoque des créatures aquatiques monstrueuses, on songe immanquablement au survival animalier. Un genre déjà suffisamment fourni en aberrations cinématographiques. Issus d’imaginaires dérangés, d’époques reculées, voire d’une autre planète, les producteurs n’ont de cesse d’exploiter insidieusement les endroits les plus inhospitaliers et méconnus de la Terre. En tête de liste, les abysses. Si le propos demeure toujours aussi intrigant et sympathique, son développement n’est guère encenseur en des mains malhabiles ou, en l’occurrence, complètement fauchées. Pâtir d’un budget d’à peine 12000£ n’est pas un défaut en soi, encore faut-il en tirer parti au maximum.
Une plongée vers les profondeurs indicibles...
Pour y remédier, le récit doit y occuper une place fondamentale. Faire preuve d’originalité et d’audace est nettement plus abordable pour une petite production indépendante qui bénéficie d’un meilleur encadrement artistique, du moins dans les intentions. Après une entame (très) librement inspirée d’Abyss pour justifier la teneur même de l’intrigue, The Creature Below quitte rapidement les contrées maritimes pour se complaire dans une sorte de huis clos. Hormis quelques exceptions et plans extérieurs vite expédiés, on se cantonne à la demeure familiale pour exposer les trois quarts de l’histoire. Là encore, rien de préjudiciable si ce n’est un traitement d’une platitude effarante.
C’est bien simple, le réalisateur ne possède aucun sens du rythme. Il enchaîne les séquences avec une constance toute lénifiante. L’atmosphère amorphe gangrène aussi bien les scènes de présentation que les moments plus violents et gores. L’impression qui en émane résulte du même principe que la dysphonie. On déblatère un discours sans parvenir à distinguer les différents niveaux d’intensité. Et c’est exactement ce qui se produit avec le présent métrage. Un ton monocorde qui ne véhicule aucune tension, aucun suspense. Pour ne rien arranger, la bande-son distille en continu un fond électro complètement hors de propos qui ajoute à la vaine entreprise un ridicule patenté.
... pour en revenir avec des idées noires plein les yeux !
De même que les enjeux se révèlent aussi ténus que prévisibles, l’approche psychologique propre à la relation entre la créature et la protagoniste reste au point mort. De par une évolution confuse et une exposition des faits rarement judicieuses, le lien qui les unit se renforce dans l’indifférence générale. On pourrait incomber la faute à l’actrice principale dont la prestation ne véhicule aucune nuance d’expression. Il ne suffit pas d’un regard de merlan frit et d’un maquillage grossier pour susciter le malaise. Mais son basculement vers la folie résulte peut-être de collègues tout aussi impavides devant la caméra.
Et la créature? Il s’agit vraisemblablement d’un céphalopode qui, étonnamment, n’éprouve pas le besoin de s’immerger dans un plan d’eau. Elle reste terrée au fond de la cave et saisit avec ses tentacules en plastique les malheureux quidams qui s’invitent sur son territoire. À chaque attaque, on s’empresse de couper le plan pour enchaîner sur la suite. On notera aussi des images de synthèse pour le moins effrayantes en début et en fin de parcours. Autant la créature que son cadre de survie rappellent à minima une approche lovecraftienne. On évoque des divinités antédiluviennes, une communication télépathique et un dénouement apocalyptique qui tendent vers cette idée.
Quand le poulpe joue les envoûteurs, la folie guette.
Au final, The Creature Below est un film d’horreur terne et sans grand intérêt. Si le budget est déjà une contrainte difficile à surmonter, Stewart Sparke y ajoute une histoire lénifiante servie par un casting amorphe et une créature difforme qui préfère rester dans l’ombre. Incapable de fournir la moindre tension à son film, le cinéaste se contente de faire se succéder les plans sans jamais parvenir à toucher ou impliquer le spectateur. L’environnement restreint de la maison est mal exploité, tandis que la violence éparse se veut explicite tout en oblitérant les prises de vue trop coûteuses. Puisant dans les mythes lovecraftiens (Dagon, L’abomination de Dunwich...) son propos, il n’en ressort qu’une pâle ébauche de la terreur qui gît dans les profondeurs de l’océan.
Un film de Stewart Sparke
Avec : Anna Dawson, Michaela Longden, Daniel Thrace