Resident Evil Damnation
La saga Resident Evil accueille un second film d’animation honnête qui reprend l’esprit des derniers jeux en date pour justifier le dynamisme de son récit. S’il n’est guère effrayant, Resident Evil Damnation exploite d’autres pistes de réflexion sur l’usage d’armes biologiques dans un contexte politique houleux. Rien de très alambiqué ou complexe, mais un effort appréciable pour amalgamer des connotations réalistes (et réalisables) à la genèse de la franchise de Capcom.
En règle générale, les films d’animation issus de jeux vidéo tiennent davantage du fan service un rien opportuniste que d’une réelle nécessité à étendre un univers en dehors du format vidéoludique. Preuve en est avec Dead Space ou encore Devil May Cry pour ne citer que deux exemples. Cela vaut également pour les adaptations live, mais celles-ci coïncident moins avec la sortie « opportune » d’un nouveau titre. C’est notamment le cas de Resident Evil Damnation qui, en 2012, prépare le terrain au sixième opus de la saga phare de Capcom. Avec Resident Evil Degeneration, on se souvient d’un premier métrage animé globalement sympathique, bien que dénué de surprises.
Aussi, Resident Evil Damnation semble s’inscrire dans la continuité de son prédécesseur à bien des égards. Mais avant cela, l’entame expose un traitement géopolitique particulièrement dense et réaliste pour la franchise. La chute du bloc de l’Est, la division des états périphériques à l’URSS, les guerres civiles et autre conflit intestin posent un contexte relativement rigoureux dans le domaine. Si cela reste un prétexte, la première approche tend à privilégier une tonalité tangible, bien éloigné des expérimentations d’Umbrella et des « échecs » de Racoon City. La dimension internationale du bioterrorisme est définitivement entérinée, à tout le moins pour les films d’animation en question.
Il est vrai que le propos a tendance à s’atténuer par la suite pour fournir un traitement plus manichéen avec des factions rebelles qui se heurtent à des dirigeants peu scrupuleux. On ne fait pas la lumière sur leur légitimité, mais les comportements qui tiennent du totalitarisme sont bel et bien présents. Si Resident Evil a longtemps pâti de scénario qui relève davantage du divertissement, on distingue des efforts consentis sur le fond. Ici, la notion d’éthique du précédent opus cède la place à une approche différente pour se cantonner à l’éternelle question : « La fin justifie-t-elle les moyens ? ». En ligne de mire de cette interrogation, on retrouve notamment les armes biologiques.
Le présent métrage intègre une donnée nouvelle avec la pleine maîtrise des lickers pour occire des cibles précises. On était habitué aux sempiternelles triturations du vivant pour s’en servir comme ressources létales. Cependant, le contrôle échappait rapidement aux créateurs pour donner lieu à des titres axés sur la survie. Ici, le concept est donc savamment détourné pour instiller une volonté consciente à travers des ennemis aussi redoutables que les lickers. L’idée n’est pas foncièrement novatrice, mais elle a le mérite d’être bien assimilée à l’intrigue, quitte parfois à jouer sur des ressorts narratifs assez prévisibles.
Au même titre que Resident Evil Degeneration, la prédilection pour l’action supplante l’horreur. Le rythme est énergique et les séquences donnent lieu à de multiples affrontements, dans un cadre assez varié. Des tunnels de la première partie aux souterrains secrets du palais présidentiel, sans oublier les rues de cette ville dévastée, les situations présentent une diversité appréciable pour se heurter à des configurations étroites, puis spacieuses ; le tout sans négliger le design de l’environnement. L’influence de l’Europe de l’Est est bien retranscrite, tandis que certains passages d’exploration rappellent les ruelles désolées de Raccoon City plongé dans une ambiance digne de Resident Evil 4. Sans doute la présence de plagas n’y est-elle pas étrangère…
En ce qui concerne l’animation, on demeure avec un style graphique réaliste qui conserve les qualités et les faiblesses du premier opus ; de quatre ans son aîné. Si l’on distingue de modestes efforts consentis sur les expressions faciales, les mouvements paraissent toujours aussi rigides. Les courses sur des plans larges sont particulièrement représentatives de cette propension à raidir les gestes du corps. Dommage, car certaines chorégraphies, notamment en combat rapproché, s’avèrent fluides et bien orchestrées. Quant à la réalisation, elle offre un cadrage de qualité avec des angles variés qui renvoient davantage à des influences cinématographiques.
Au final, Resident Evil Damnation est une agréable surprise. Certes, son scénario présente des failles, tout comme certains aspects de l’animation. Il n’en demeure pas moins un métrage intéressant, fidèle à l’esprit de la saga, jusqu’à imiter son virage orienté vers l’action au détriment de l’horreur. On apprécie cette volonté de trouver de nouvelles pistes d’exploitation pour justifier l’usage d’armes biologiques, ainsi qu’un contexte géopolitique bien amené, même si, par la suite, il n’est guère développé. S’il reste sommaire et peu ambitieux dans ses intentions, il en ressort un film efficace qui offre une continuité louable aux jeux vidéo, contrairement à certains opus de la saga-live…
Un film de Makoto Kamiya
Avec : Laura Bailey, Roger Craig Smith, Carolyn Lawrence, Sam Riegel