Messe Noire
L'insuffisance du budget force la mise en scène à étoffer au maximum avec des bouts de ficelle visant à simuler l’époque de la colonisation espagnole de l’Amérique. La séquence d’introduction a lieu sur une plage, où les toges et les morions (casques de conquistador) servent à planter le décor. Esteban, moine aux pratiques pas très catholiques, se voit excommunié par un de ses collègues qui lui reproche d’organiser des réunions publics durant lesquelles il décapite allégrement des volontaires forcés à la gloire d’un dénommé Satan.
Esteban et ses adeptes en pleine messe noire sur la plage
Quelques siècles plus tard, une école militaire s’est bâtie autour de la chapelle dans laquelle le fameux Esteban est parvenu à dissimuler les restes de son culte. Stanley Coopersmith, souffre-douleur et piètre joueur de l’équipe de foot, se voit contraint de ranger le sous-sol du lieu en question, puni pour son incompétence sur le terrain. Il découvre accidentellement une faille dans un mur menant à une crypte tombée dans l’oubli. Il y découvre les vestiges de la secte d’Esteban, dont les secrets du rite sont inscrits dans un manuscrit orné d’un pentacle. Coopersmith entreprend alors de déchiffrer le livre avec l’aide de son ordinateur.
Stanley Coopersmith parviendra t-il à invoquer l'esprit du mal?
La trame reprend grossièrement certains éléments clés des classiques du film de possession des années 70 que sont L’exorciste, La malédiction ou Carrie. Il ne parvient pas pour autant à en reproduire l’ambiance mais tombe au contraire dans une forme de parodie involontaire. Les mésaventures pathétiques du personnage principal sont décuplées par l’air bovin de l’acteur dont le choix laisse parfois penser que l’aspect parodique n’est pas accidentel.
L’originalité du film, s’il y en a une, repose sur l’utilisation de l’ordinateur, intermédiaire indispensable au héros pour réussir l’invocation. Encore peu répandu en 1981, l’ordinateur tient quasiment le second rôle dans ce film qui mise beaucoup sur la représentation des images qu’il génère. Une fois les formules du manuscrit entrées dans le dispositif informatique, l’esprit malin se manifeste à travers l’écran sous forme d’un mélange de pentacles, de croix inversées et de messages traduisant les volontés d’Esteban. Le tout a mal vieillit mais reste de relativement bonne facture si l’on replace le film dans son contexte historique. Le rendu est en tout cas plus convaincant que celui des décors en carton-pâte sensés donner forme à une crypte du XVIème siècle.
L'esprit diabolique d'Esteban exprimant ses envies via l'ordinateur
Le récit est ponctué de scènes gores, trashs mais sans surprises pour la plupart, mis à part peut-être lorsqu'une jeune fille meurt dévorée par une horde de sangliers dans une baignoire ! La séquence finale conclue les péripéties de notre héros dans une orgie sanglante complètement délirante. Après avoir subi une nouvelle humiliation, Coopersmith parvient finalement à invoquer l’esprit d’Esteban qui prend pleinement possession de lui et l'entraîne dans une intense séance de décapitation. Dans cette joyeuse frénésie meurtrière, le sens est plus que jamais délaissé, faisant place à une gratuité absolue et à la mort brutale de tous les personnages.
Coopersmith/Esteban dans ses œuvres
Pas étonnant que Messe noire ne soit sorti en DVD qu’en 2014, sa qualité médiocre n'appelant pas beaucoup de demande. Cette série B de dernière zone, lorgnant fortement vers le Z, rassemble tous les clichés négatifs attribués à ce type de production. En tentant de recycler ce qui avait fait la réussite d’autres films avant lui, Messe noire ne parvient pas à se sortir des méandres de la pure exploitation commerciale. Malgré les défauts qu'il accumule, le film a le mérite de pousser son délire jusqu'au bout. C'est finalement un film gore assez jouissif qui pourra satisfaire les amateurs du genre peu regardants. Pour les autres, on préférera revoir le mythique Evil Dead, sorti la même année.
Un film de Eric Weston
Avec : Clint Howard, R.G. Armstrong, Joseph Cortese, Claude Earl Jones