Hinamizawa: Le Village Maudit
Adapter un manga en jeu vidéo s'est déjà vu par le passé. Ghost in the shell, Bleach, Dragon ball, .Hack et tellement d'autres. Il est vrai (à l'instar des adaptations concernant les films) que la qualité n'a pas toujours été au rendez-vous, mais l'inverse se produit rarement. Bien sûr, les mastodontes (Mario, Sonic, la saga Street fighter) ont eu droit à leur heure de gloire sur le petit écran (parfois sur le grand et pas pour le meilleur). Alors, quand il s'agit d'un visual novel ayant difficilement passé les frontières nippones (8 ans pour voir arriver chez nous ledit jeu), cela est d'autant plus surprenant.
Un petit village bien tranquille ? Pas sûr.
Une méthode alambiqué s'il en est et surtout risqué lorsqu'il n'est pas maîtrisé. Cela explique sans doute son originalité et sa force en dépit de quelques faiblesses. Le scénario d'Higurashi se révèle assez complexe dans son ensemble. Beaucoup d'intervenants, d'enjeux à prendre en considération et d'histoires secondaires qui tissent le quotidien des villageois d'Hinamizawa. Il paraît difficile d'aborder l'anime sans le suivre assidûment. En soi, ce n'est pas une gageure puisque le plaisir est au rendez-vous. Et même dans cette optique, certains passages nous laissent dans le flou.
Non, vous ne voyez pas double.
La raison principale réside dans une atmosphère malsaine et permanente qui sait jouer des moments plus détendus pour mieux nous piéger une fois les hostilités entamées. Doté d'une photographie bluffante où les teintes chaudes du crépuscule sublime des scènes d'une rare beauté, Higurashi se targue de distiller son aura délétère avec parcimonie. Les rires de possédés, les cris de douleurs, la sensation d'être épié, les astuces pour se sentir mal à l'aise ne sont pas novatrices, mais parfaitement retranscrites à l'écran pour nous faire prendre en considération les sentiments et émotions des protagonistes. À noter que l'ambiance sonore a fait l'objet d'un soin tout particulier : stridulation d'insectes, croassements lugubres, bruissements de feuilles. Ce ne sont que détails qui, mis bout à bout, contribue à cette atmosphère malsaine.
Une mort renversante.
Le quotidien de Keiichi et ses amies paraissent d'une naïveté confondante avec la vie scolaire et les parties endiablées de leur fameux club très fermé, mais il dissimule sous ses airs bon-enfant des tourments palpables. La souffrance de chacun contribue à l'épaisseur de leur personnalité. Keiichi et ses visions paranoïaques, la rivalité sous-jacente entre les soeurs jumelles Mion et Shion, la maltraitance de Satoko sont autant d'exemples à citer qui montre que les apparences cachent le plus souvent des plaies que l'on ne parvient à penser.
La crucifixion est encore à la mode.
Saison 2 : intitulée sobrement Kai (qui signifie réponse), cette deuxième saison d'Hinamizawa permet d'éclairer toutes les zones d'ombre qui demeurait encore en suspens. Ainsi, les séquences qui semblaient incohérentes ou inintelligibles prennent ici une tout autre signification. Vingt-quatre épisodes indispensables pour prendre pleinement conscience du mystère entourant le village maudit, mais qui, par la même, ôtent quelque peu l'ambiance malsaine initiée auparavant. Pas de scènes de tortures ou de plongées tortueuses dans la folie. Les arcs se veulent plus conséquents (quatre arcs principaux) et se penchent sur le passé des protagonistes mis de côté lors de la première saison. Kai boucle la boucle tout en se terminant sur une note quelque peu déstabilisante.
Le dîner est servi.
OAV 2 (Saison 4) : Deuxième série d'OAV qui se veut dans la continuité de son prédécesseur. Autrement dit, on passe à la trappe l'atmosphère poisseuse et sinistre au bénéfice d’épisodes à l'intrigue nulle où le principal atout est de contempler les formes aguicheuses de ses charmantes protagonistes dans des costumes tout aussi seyants. Il n'y a guère d'intérêt à poursuivre ce genre d'OAV destinée encore une fois aux fans de la première heure. En somme, un bonus « deluxe » sans grand intérêt qui dénature quelque peu la caractérisation des personnages
N. B. Étant donné les deux séries d'OAV comportent à elles deux seulement neufs épisodes et qu'ils n'entrent pas en compte dans l'intrigue à proprement parler, la note porte sur les deux premières saisons. Devant leur excellence, il n'y a pas lieu de faire une moyenne.
Un film de Chiaki Kon
Avec : Sôichiro Hoshi, Mai Nakahara, Satsuki Yukino, Yukari Tamura