Helix
Malgré leur taille microscopique, les virus s’arrangent toujours pour menacer la planète entière. Thème récurrent dans les films catastrophe, ils alimentent avec constance les grands et petits écrans. Citons rapidement l’éphémère Burning zone ou le classique de Michael Crichton: La menace Andromède. Alors, quand Ronald D. Moore, amateur de science-fiction (Star Trek, Battlestar galactica), s’attaque à ces organismes hostiles, on peut se montrer tout à fait confiant sur le niveau qualitatif du produit final. Pourtant, le nouveau projet de SyFy est loin de faire l’unanimité; trop prévisible et inintéressantselon les plus sévères. Cette médiocre réputation se justifie-t-elle?
Il est vrai que l’amorce n’a rien de foncièrement originale: un mystérieux virus ravage une base scientifique en Arctique. Une équipe du CDC est envoyée sur place pour enquêter et enrayer l’épidémie. En un sens, le pitch de départ révèle des sentiments contradictoires concernant cette série. D’une part, l’on trouve l’intrigue classique et linéaire. D’autre part, la mise en scène et l’atmosphère se montrent efficaces et soignées à plus d’un titre. Qualités et défauts s’équilibrent à différents stades pour nous offrir une première fournée d’épisodes dont on ne sait que trop penser dans un premier temps.
Au bout du tunnel, il y a...
L’espace restreint se résume à un complexe scientifique qui semble s’étirer à l’infini sur et sous la glace de l’Arctique. Malgré l’aspect tentaculaire des couloirs, les niveaux qui se multiplient, il se dégage de ces lieux froids et austères un sentiment claustrophobique semblable à un piège mortel qui se referme lentement, mais sûrement sur le personnel de la base. Il n’y a qu’à constater la superficie de chambres individuelles pour s’en convaincre. Tout y est aménagé pour le travail et la recherche. Bien sûr, on est loin d’atteindre l’excellence d’un The thing, mais cet environnement reste propice à la paranoïa et aux comportements inopinés en pareilles circonstances.
Réactions pas toujours justifiées ou nécessaires qui étayent une caractérisation sans complaisance, comme si l’ensemble des protagonistes (à une ou deux exceptions prêtes) avait quelque chose à se reprocher. Nous ne sommes pas en présence d’un traitement purement manichéen, car le flou sur les motivations et la véritable personnalité des individus concernés contredit presque constamment l’image que l’on se faisait d’eux. Difficile de dénouer les valeurs de chacun pour avoir un tableau composé de blanc et de noir. On a droit à toute une gamme de gris qui reflète le passé et les expériences en dépit des idées reçues ou des fausses pistes disséminées çà et là.
On ouvre grand la bouche et on évite de vomir du sang noir.
Cela peut décontenancer, voire exaspérer, de jongler de la sorte si l’on apprécie les éléments qui s’imbriquent les uns aux autres. Il est vrai que cela entraîne parfois de menus contradictions ou incohérences si l’on pousse le vice de tout répertorier. Néanmoins, l’intrigue se veut suffisamment simpliste et linéaire dans ses fondements pour ne pas perdre le public. Si l’histoire se montre si prévisible, il n’en demeure pas moins que le suspense reste bien construit, malgré une seconde moitié qui s’écarte sensiblement de son sujet principal. Cela permet de ne pas avoir l’impression de tourner en rond, mais cette bifurcation vers le fantastique pur ne plaira pas forcément à tous.
D’ailleurs, les ultimes épisodes de cette première fournée parviennent avec difficulté à poser les bases pour la suite. Là où chaque épisode correspondait à un jour de contamination, on entrevoit furtivement les événements plus de 200 jours après. En dépit du côté abrupt d’un tel procédé, les aboutissants de l’intrigue tolèrent n’importe quelle largesse pour en arriver à ce stade. La saison2 sera-t-elle l’objet de ce blanc qui mérite de plus amples éclaircissements ou se contentera-t-elle d’avancer en oubliant les justifications nécessaires? Le doute est permis tant cette tournure se révèle étonnante et pas vraiment adéquate pour susciter l’attente et la curiosité chez le spectateur.
Des symptômes peu ragoûtants.
En ce qui concerne le virus et ses effets sur l’organisme humain, on oscille également entre le singulier et le déjà-vu. Le sang noir, la liquéfaction, l’alitement des contaminés perclus de veines apparentes ou les hallucinations sont des symptômes inédits (ou presque). En revanche, le second stade traduit un état d’agressivité extrême. L’altruisme et le comportement similaire à la cohésion des fourmis et des abeilles (ce qui trahit une intelligence et un but) se rapprochent davantage des zombies «nouvelle-génération» avec leurs courses effrénées et leur volonté à grossir leurs rangs. De là à songer à des films tels que 28 jours plus tard, il n’y a qu’un pas...
Au final, Helix multiplie les sentiments contradictoires à son égard. Entre une intrigue initiale linéaire au possible et néanmoins plaisante, un final emplit de doutes et de spéculations, cette première saison nous laisse une impression partagée à plus d’un titre. L’on sent la volonté de ne pas ennuyer le spectateur qui se laisse prendre au jeu d’un suspense agréable. Cependant, les choix narratifs s’avèrent pour le moins discutables pour l’avenir de la série qui perdra peut-être son public de départ pour en trouver un autre. Entre des personnages contradictoires et peu attachants (travaillés en ce sens pour souligner l’ambivalence de chacun), une approche en vase clos réussit, ainsi qu’un récit évoluant selon son bon vouloir, Helix ravira les amateurs de virus (langages parfois techniques), et ce, malgré un traitement chaotique.
Saison 2 : 3/10
Un film de David Slade
Avec : Billy Campbell, Jordan Hayes, Mark Ghanimé, Meegwun Fairbrother