Doom
La saga Doom est connue de tous les fans de jeux vidéo pour avoir popularisé tout un genre : le FPS (First Person Shooter). Certes, il y avait bien Wolfenstein, mais Doom était tellement novateur et supérieur à son aîné de seulement un an qu'on lui donna son nom pour caractériser les jeux de tirs à la première personne, soit "Doom-like". Des couloirs labyrinthiques, des beuglements, des cris, quelques énigmes assez basiques, mais surtout pléthore d'ennemis à tuer ; tel était le programme des réjouissances en commençant une partie. Les mauvaises langues diront que rien n'a vraiment changé depuis. Pour une fois, elles n'auraient peut-être pas tout à fait tort. Il aura fallu attendre douze ans après la sortie du premier Doom pour voir son adaptation cinématographique débarquer dans les salles obscures à grands coups de pompes dans la tronche.
Ca va faire mal !
Il n'est nul besoin de rappeler que le septième art et les jeux vidéo ne font pas forcément bon ménage. Malheureusement, on a couramment eu droit à des transpositions qui dorénavant appartiennent au domaine du nanar (Street fighter, Super Mario Bros ou Alone in the dark). D'un autre côté, les jeux vidéo issus de films ne sont pas en reste. Souvent bâclés faute de temps et d'ambitions, ils parviennent difficilement à faire honneur à leurs homologues sur pellicules (l'une des rares réussies est celle de King Kong). Pourtant, il y a quelques réalisateurs passionnés et sérieux qui tentent de retranscrire les univers vidéoludiques avec application. Notamment Christophe Gans avec Silent Hill et l'inégale saga des Resident evil (le premier et le troisième volet mérite que l'on s'y attarde). Dès lors, adapter Doom est une entreprise à double tranchant : satisfaire les fans de la première heure tout en s'accommodant aux contraintes d'un film pour un jeu aussi... subjectif.
Alors que peut-on en attendre tout en sachant que Doom ne se démarquait pas par un scénario recherché, mais par une ambiance travaillée et un gameplay original ? Ce dernier point n'étant pas de circonstance dans le cas présent, il faut donc se pencher sur l'atmosphère, un rythme nerveux et un visuel accrocheur. En somme, un bon divertissement sans prise de tête et esthétiquement réussit. Si les moyens sont à la hauteur de ces exigences, cela ne devrait pas être trop difficile. Pour cela, on retrouve derrière la caméra, Andrzej Bartkowiak, responsable de Roméo doit mourir ou Hors limite. Des films d'action limités dans leurs ambitions, mais efficaces. Doom semble avoir donc trouvé son réalisateur pour remplir son contrat.
Avant d'aller sur Mars, ne prenez pas de petit déjeuner.
On parlera rapidement du scénario où il est question d'envoyer une équipe de la RRTS (les forces spéciales) sur Mars pour constater que des créatures monstrueuses ont attaqué les scientifiques de la base. Basique au possible avec son lot de rebondissements prévisibles, l'histoire de Doom est un simple prétexte au déferlement d'action qui s'annonce. On remarquera de légères similitudes avec Aliens - Le retour dans son déroulement. Un résultat à la hauteur de nos espérances, c'est-à-dire modeste. Pour en finir avec les points qui fâchent, notons que les personnages sont peu développés. Une équipe de forces spéciales où se côtoie le pervers invétéré, le taciturne colosse, l'Afro-américain dragueur et rigolo de service, le héros torturé ou le petit nouveau. Seul se démarque du lot Sarge, leader qui voue à son travail une sorte de fanatisme inconsidérée sans se soucier des dégâts collatéraux.
En revanche, le rendu est autrement plus plaisant. Après la sortie de Doom 3 qui lorgnait du côté du survival horror pour l'ambiance, il semblait intéressant de s'appesantir sur cette constante menace sans parvenir à la discerner dans l'immédiat. L'intégralité de la base d'Olduvai est quasiment plongée dans l'obscurité totale. On joue sur des éclairages hésitants, une pénombre plus ou moins prononcée ou sur les lampes des armes pour se frayer un chemin à travers ce dédale peu avenant. Bien entendu, l'on verra les monstres apparaître quand l'occasion se présentera, mais on nous fait d'abord ressentir leur présence avant d'entamer les hostilités. Indirectement, le spectateur participe à l'opération.
Le Big Fucking Gun est de la partie !
Puis, l'on comprend mieux pourquoi ces aberrations se terraient dans les ténèbres. Leur design a fait l'objet d'un soin tout particulier et est assez proche de ce que l'on a pu contempler dans le troisième volet de la saga. Hormis les mutants au premier stade de la contamination (que l'on peut facilement assimiler à des zombies), les monstres plus évolués ne sont jamais les mêmes. On verra tour à tour un colosse insensible à la douleur, une tête à onze yeux (!), une sorte de démon serti d'un arrière-train métallique, chacun est différent, et ce, pour une raison que nous ne citerons pas ici pour ne rien divulguer. Certes, on aurait aimé être surpris à l'angle d'un couloir par un cacodémon, un mancube ou un chevalier de l'enfer (un Minotaure), mais leur apparition n'aurait pas forcément servie l'histoire.
Tout comme dans le jeu, il semblait important d'accorder aux armes une place de choix dans le film. Là encore, tout n'est pas respecté à la lettre, mais les clins d'oeil empêchent d'être pleinement décontenancé. Les classiques sont de la partie : mitrailleuse lourde, pistolet, fusil à pompe, la sensationnelle tronçonneuse et, cerise sur le gâteau, le mythique BFG, toujours ravi de faire un brin de causette sur la physique de la matière avec ses amis.
Sympathique hommage au jeu.
Si cette adaptation cinématographique prend quelques libertés avec le jeu (difficile de faire autrement dans le cas présent), il n'en demeure pas moins qu'il s'avère un divertissement survitaminé. Dans un contexte de science-fiction, le reste de l'histoire n'est que de l'action pure et dure. Autrement dit, le scénario se veut très prévisible, mais ce n'est clairement pas 'l'objectif que de nous emporter dans un récit complexe aux ramifications multiples. On saluera un passage particulier en fin de parcours, véritable hommage au FPS qui immerge le spectateur comme il se doit. Un plan-séquence d'environ cinq minutes, inédit dans le septième art. Sans être d'une originalité folle, Doom est quand même bien loin des navets suscités lorsque l'on parle jeux vidéo au cinéma.
Un film de Andrzej Bartkowiak
Avec : Karl Urban, Dwayne Johnson, Rosamund Pike, Ben Daniels