Dinotopia
Victimes d'un accident d'avion, Karl et David échouent sur une île non répertoriée répondant au nom de Dinotopia. Dans ce monde perdu, ils découvrent des hommes et femmes vivants en harmonie avec la nature et... des dinosaures ! À travers leur périple, bien des surprises vont s'offrir à eux...
Marco Brambilla est un réalisateur discret, peut-être trop. À son actif : le mémorable Demolition man, ainsi qu'une comédie d'action peu connue (Excess bagage) et cette adaptation issue de l'imaginaire de James Gurney, j'ai nommé Dinotopia. Les dinosaures sont une manne providentielle dans le milieu du cinéma. On a pu les apercevoir dans des blockbusters passés au rang de classiques (Jurassic Park, Le monde perdu...), mais également dans de sombres petites série B, voire Z (Carnosaur, Raptor...). Toujours est-il que nos charmants sauriens se complaisent dans le survival animalier et de temps à autre dans le film d'aventures. Aussi, les retranscrire dans un univers de fantasy demeure original et inédit dans le 7e art.
Un moyen de transport plus efficace que la SNCF et la SNCB réunies !
Contrairement à ce que l'on aurait pensé de prime abord et au vu de la durée de cette mini-série, l'introduction est assez brève. Cinq minutes qui relate le crash de l'avion et l'on rentre dans le vif du sujet. Une excellente entame qui permet de découvrir les différents protagonistes en même temps que cet univers enchanteur. Ainsi, un équilibre se créé entre action et exploration sans jamais lésé l'un ou l'autre. On prend connaissance tant de l'immensité de l'île que des us et coutumes des habitants (un point qui sera développé un peu plus tard). Inutile de préciser que l'homme n'est plus en haut de la chaîne alimentaire. Une première approche qui traduit un certain émerveillement face à cette harmonie.
Le repas est servi.
Outre l'aspect contemplatif qui métamorphose l'aventure en véritable rêve éveillé, Dinotopia fait un parallèle inattendu et intrigant avec notre société. L'expérience pourrait se résumer en deux mots : harmonie et humilité. L'harmonie d'une vie qui allie savoir et spiritualité. Une alchimie qui permet un meilleur apprentissage de son environnement grâce à la connaissance du moi-intérieur. Pour comprendre son entourage (tant ses contemporains que les autres espèces), il faut passer par une introspection de nos désirs et de nos volontés. Il en ressort une troublante quiétude qui transforme littéralement notre perception de la réalité.
Notre trio d’aventuriers.
L'humilité est un état d'esprit tout aussi important que le précédent. En prenant conscience de faire partie d'un tout et non d'être le centre de toutes les attentions, de nouvelles perspectives s'offrent à nous tant sur le plan personnel que sur la manière d'appréhender l'avenir de la communauté. L'homme n'est pas le sommet de l'évolution, mais une extension des prodiges de la nature. Lorsque l'on confronte l'espèce dominante actuelle à celle plus ancienne, c'est pour nous permettre de relativiser notre place sur la planète. La modestie n’empêche nullement l'épanouissement de la société et de l'individu.
Une vue à couper le souffle, un monde incroyable.
Outre ses aspects sous-jacents qui apportent une indéniable épaisseur au récit (qui à l'origine est destiné à un public jeune), Dinotopia s'avère aussi une formidable odyssée où la contemplation prend des allures d'émerveillement face à un univers aux antipodes du nôtre. Les valeurs suscitées sont prépondérantes dans le quotidien de tout un chacun sans pour autant les handicaper sous quelques formes que ce soit. Bien au contraire, on a l'impression qu'ils ont trouvé un bonheur simple fait d'une satisfaction permanente des cadeaux de la nature. Rien ne semble entraver cette harmonie parfaite.
Le crépuscule accentue la magie de Dinotopia.
À ce titre, les deux naufragés doivent réapprendre à vivre. D'un certain côté, ils « importent » les travers de la société de consommation à Dinotopia. David parvient à s'y adapter sans difficulté, mais Karl veut s’évertuer dans autant d'impasses. Refus de l'autorité, refus de s'accoutumer à une nouvelle façon de vivre, refus de ne pas être flatté par son ego à travers les produits de consommation et autres publicités nauséabondes. Autrement dit, il incarne le parfait individu formaté et modelé de notre société. Il s'en dégage alors un certain égocentrisme où tout ce qui a trait à Dinotopia doit tourner autour de lui. Plus qu'une perte des repères, il s'agit d'une perte de ses possessions qu'il essaye de compenser. Il apparaît donc assez antipathique et arriviste dans le fond.
De nouveaux horizons s’offrent à David.
Étant donné que le projet a bénéficié de 80 millions de dollars de budget, les effets spéciaux deviennent quasiment un personnage à part dans l'histoire. On remarque la grandiloquence des décors. De Waterfall City aux forêts inhospitalières, tout est sujet à s'attarder sur l'esthétique et l'inspiration du cadre. On frôle le sans-faute. En ce qui concerne les dinosaures, le résultat est un peu plus mitigé. Les reptiles sont convaincants dans l'ensemble, mais il leur manque un effet de masse pour les élever à une autre échelle que la nôtre. Cela n'empêche nullement de s’immerger comme il se doit dans cet univers magnifique.
La pierre solaire dans tous ses états.
Bref, Dinotopia est une mini-série ambitieuse qui parvient à satisfaire un public vaste sur nombre d'aspects. Si la beauté intrinsèque de l'île est indéniable, le parallèle effectué avec notre société (par exemple dans les défauts émergents des dirigeants pendant la progression du récit) n'en est que renforcé. Le foisonnement de concepts pour aspirer à une vie meilleure étonne de par sa simplicité si tant est que l'on a la volonté de changer. On retiendra principalement le principe de non-violence qui occupe une place prépondérante dans l'intrigue. Malgré quelques affrontements inévitables, cela nous change des habituels combats entre le bien et le mal (une notion qui n'existe pas à Dinotopia) qui habite continuellement ce genre de productions.
Un film de Marco Brambilla
Avec : David Thewlis, Tyron Leitso, Wentworth Miller, Katie Carr