Gingerdead man
Fermez les yeux et imaginez ce que donnerait les aventures d'un cousin dégénéré (et hardcore) du Tibiscuit de Shrek, le tout mis en boîte par l'inusable Charles Band. Vous en conviendrez, le résultat a de quoi être alléchant avec au programme du fun et du gore, pour peu que le réalisateur s'en donne les moyens.
Malheureusement c'est là que le bâs blesse dans Gingerdead Man. Car malgré une idée de départ amusante, l'ensemble se montre bien trop cheap et trop sage pour remplir pleinement son contrat.
Mamy pocharde et son gros gun...
Meurtrier du frère et du père de Sarah, le psychopathe Millard Findlemeyer est envoyé sur la chaise électrique grâce au témoignage de celle-ci. Assoiffée de vengeance, la mère du tueur envoie à Sarah une pate à gateau maléfique contenant les cendres de son défunt fils. En l'utilisant pour une de ses recettes, Sarah donne ainsi vie à un bonhomme en pain d'épice possédé par l'âme du tueur, bien décidé à mettre la main à la pate pour se venger...
Clair qu'avec une gueule pareille y a de quoi être vénère...
Un tueur fou réincarné dans un bonhomme en pain d'épice... Franchement, fallait oser. Ce postulat de départ n'est pas sans rappeler celui de la saga Chucky ou de l'amusant Jack Frost mais au contraire de ces films, celui de Charles Band n'exploite pas (ou très peu) le potentiel de son idée de base. En effet, au grand désarroi du spectateur, le bonhomme en pain d'épice se fait rare à l'écran et ses méthodes pour tuer ses victimes restent très banales. Seule la séquence avec la femme recouverte de chantilly sort du lot car pour le reste, le mini-tueur fera dans le classique avec un bon vieux couteau, une voiture et un flingue.
Ce point est sans aucun doute le plus décevant du film car les meurtres, qui auraient pu être très funs, n'ont rien d'original. De fait, à part l'apparence du tueur, rien ne différencie réellement Gingerdead Man d'un banal slasher et il faudra attendre la séquence finale pour que l'aspect "bonhomme en pain d'épice" soit enfin exploité (avec une amusante scène de possession à la clef).
Pour compléter le tableau, la mise en scène paresseuse des meurtres n'arrange rien et ne procure aucun frisson. Charles Band est plutôt mou (haha!) et shoote le film de manière endormie. Pas ou peu de cadrages inventifs, il se contente d'illustrer l'histoire, sans plus.
Cet homme est un redouble catcheur, 'tention!
Mais le réalisateur n'est pas le seul fautif car à l'instar de ce dernier, le responsable des dialogues a clairement déposé les armes et nous propose des lignes parlées d'une banalité affligeante.
Alors, comme pour suivre le mouvement de leurs confrères, les doubleurs ont décidé de nous gratifier d'un doublage à coté de la plaque.
Seul le Gingerdead Man est crédible avec ses punchlines amusantes mais cela tient sans doute plus au personnage en lui-même qu'au talent de son doubleur.
A coté de toute cette médiocrité, la prestation correcte des acteurs semble presque étrange et si certains d'entre eux sont ridicules ce n'est pas de leur faute, ils le doivent uniquement à leur personnage.
Il faut dire que les protagonistes n'ont pas été gâtés par les scénaristes. Entre la mamy alcolo, le gringalet catcheur, le délinquant niais, la greluche énervante accompagnée de son père cowboy et l'héroïne nunuche, c'est un vrai festival de têtes à claques.
Et comme si ça ne suffisait pas, les deux scénaristes nous ont concocté l'histoire d'amour la plus improbable qui soit, à base de coups de poing dans la gueule ("Tu te rappelles, c'est moi qui t'avais cassé le nez quand on était petit. Depuis je suis amoureuse de toi et je me fiche que tu sois devenu un gros délinquant...").
Gary Busey est peut-être le seul dont le personnage soit mémorable car sa prestation hallucinée dans la scène d'ouverture est étonnante. Par la suite, le Gingerdead Man (à qui il prête sa voix en VO) restera relativement réussi malgré un look beaucoup trop caoutchouteux pour être crédible.
Freestyle Gary Busey!
Néanmoins, malgré ses tares, Gingerdead Man parvient à rester amusant grâce à une foule de détails nanards plus ou moins volontaires. Ainsi, dans le film de Charles Band, vous apprendrez que:
- Un bonhomme en pain d'épice de 30 centimètres de haut peut conduire une voiture.
- Lorsqu'une voiture menace de vous passer sur le corps, la meilleure manière de l'éviter n'est sans doute pas de s'adosser à un mur en hurlant.
- Il ne faut pas menacer un criminel qui vous colle un pistolet sous le nez, surtout si de votre côté vous n'êtes armé que d'un canif et qu'en plus vous êtes trop loin pour l'atteindre.
- D'étranges inconnus en tuniques distribuent des mélanges de pain d'épice aux portes des commerces sans que personne ne s'en étonne.
- Les gens possédés par des pâtisseries ont la langue bleue et voient leur crâne se déformer.
- Certains hommes sont excités par l'idée qu'une fille puisse leur casser le nez à coups de poing.
- Il vaut mieux rester enfermé à l'intérieur d'un bâtiment offrant une multitude de cachettes au mini-psychopathe plutôt que de sortir sur le parking où on le verrait arriver de loin.
Etc... Etc... Etc...
Bref, vous l'aurez compris, Gingerdead Man regorge d'incohérences amusantes. On regrettera par contre que l'ensemble manque de folie et que l'aspect "pain d'épice" du tueur soit si peu exploité car il y avait matière à offrir au public un film bien plus déjanté que celui-ci.
Une voiture vous fonce dessus? Vite, réfugiez-vous contre un mur!
En résumé, un film comme Gingerdead Man est à réserver aux spectateurs qui savent à quoi s'attendre. On ne regarde pas ce film comme on regarderait un film de James Cameron par exemple. Ni même un épisode de Chucky. Le métrage de Charles Band lorgnerait plutôt vers la saga des Leprechaun en terme de qualité artistique.
Gingerdead Man est fauché, Gingerdead Man est con mais malgré tout, Gingerdead Man reste fun pour les indulgents et les amateurs de mauvais films sympathiques. De plus, sa courte durée (60 min à peine!) permet de ne pas s'ennuyer trop longtemps si l'on est réfractaire à ce type de cinéma.
Un film de Charles Band
Avec : Gary Busey, Robin Sydney, Ryan Locke, Alexia Aleman