Death valley
Si l’on excepte l’incontournable Walking dead et les animes japonais, le zombie et la série TV sont un mélange plutôt rare. Cette créature en décomposition est davantage à l’aise sur grand écran. Pourtant, l’on a eu droit à Dead set, mini-série savoureuse tournant en dérision la télé-réalité de fort belle manière. Plus récemment, le projet avorté de Zombieland et son épisode pilote qui ne connaîtra jamais de dénouement. Death valley, c’est un peu l’outsider que l’on n’attend pas vraiment. Le style de production qui fait son bonhomme de chemin sans faire de vagues, a fortiori lorsque l’audimat ne suit pas et précipite une deuxième saison dans les oubliettes. Cette série rencontrera-t-elle un succès d’estime auprès des amateurs du genre ou n’est-elle qu’une piètre tentative mercantile à ignorer sans états d’âme ?
Dur, dur de faire une patrouille quand on fait une petite escale sur le tournage d’un film porno.
Mais Death valley n’est pas l’affaire que des morts-vivants. Nous avons droit à deux autres figures emblématiques du cinéma horrifique avec les loups-garous et les vampires. En cela, le concept se montre assez singulier, bien que les crossovers de cet acabit ont rarement fourni de bons résultats. La faute principalement à un manque de cohérences et des univers trop disparates. Toutefois, les scénaristes ne s’entichent pas de détails saugrenus ou pompeux pour laisser libre cours à leur délire. En effet, l’action se situe un an après l’invasion de tout ce beau monde et la ville semble s’écouler (presque) normalement dans la vallée de San Fernando (territoire majoritairement couvert par Los Angeles).
L’on accompagne donc les membres de l’UTF, brigade de police très spéciale, qui est chargée de traquer et de contenir la menace. Seulement, nous avons droit à une équipe de bras cassés qui se montrent au mieux benêts, au pire incompétents. En des circonstances différentes, on pourrait fustiger ce lot de caricatures ambulantes avec tous les clichés sexistes qui s’ensuivent, mais le ton est clairement à la rigolade. C’est dans un esprit de second degré (voire troisième ou plus selon affinités) parfaitement assumé que l’on se retrouve avec un capitaine macho et narcissique à la voix détestable, le gros balourd sensible, l’obsédé de service, la jeune recrue ultra-compétente que personne ne remarque et bien d’autres encore. Les acteurs ont la fâcheuse manie à en faire plus que de rigueurs, mais cela ne choque pas vraiment outre mesure.
Les courses chez Ikea ne sont pas toujours de tout repos...
Seulement, cet humour potache est à double tranchant. Certaines séquences peuvent se montrer parfaitement opportunes et bien trouvées, tandis que d’autres se révèlent plutôt lourdes, voire irritantes, pour les plus ratés. En misant tout sur l’aspect humoristique, la série a tendance à en faire de trop. L’ensemble reste distrayant, mais la qualité des épisodes est d’un intérêt inégal, car les situations ne sont pas toujours adéquates ou redondantes. À vrai dire, l’on a l’impression de découvrir une version trash de Lawman (Au service de la loi), le docu « réalité » avec Steven Seagal. Des journalistes qui suivent les policiers durant leur patrouille. On n’est pas dans une dénonciation de ce type d’émission ou même d’une autodérision, mais le constat est flagrant.
Ce choix confère parfois à la mise en scène des passages chaotiques où les angles et les tressautements de l’image (le caméraman court) donnent un aspect faux-documentaire. Fort heureusement, ce genre d’initiatives reste assez anecdotique dans l’ensemble. Les décors se cantonnent à Los Angeles, mais font montre d’une certaine variété avec les collines, les zones urbaines à forte densité, le commissariat, un stade ou les quartiers en périphérie de la ville. Ce n’est pas toujours évident (surtout en tournant principalement la nuit), mais l’appréciation générale offre un terrain de jeu assez jouissif compte tenu de son potentiel.
Pas de problèmes, nous avons la situation bien en main !
En ce qui concerne nos chères créatures, on oscille entre l’acceptable et le très bon. Le maquillage des zombies est assez bluffant (compte tenu du budget) avec un panel de physique et de possibilités très diverses. On a droit également aux deux versions du mort-vivant avec les deux à l’heure (très lent, donc) et ceux qui détalent comme des lapins. Les loups-garous sont assez classiques avec une transformation que l’on ne verra jamais et des expressions faciales un rien ahuries lorsqu’ils sont sur le point de céder la place à l’animal. En revanche, les vampires n’apportent quasiment rien avec un teint hâve et deux canines très discrètes. Vous l’aurez compris, les codes sont repris de manière aléatoire sans un véritable respect, mais sans le dédain qui caractérise les pires navets.
On oublie donc le côté survivaliste qui n’a aucun intérêt dans le cas présent. Ce n’est pas avec trois bouts de ficelles et l’assaut d’un bus par une horde de zombies qui changera cet état de fait. Les vampires se prostituent pour du sang ou excellent dans le trafic de drogues, les loups-garous n’en font qu’à leur tête s’ils ne sont pas confinés à la pleine lune, mais aussi les morts-vivants qui errent dans les rues tels des SDF. En somme, on a droit à la lie de l’humanité où l’on trouvera une sorte de transposition des différentes tares et criminels de nos sociétés sous une forme bien moins flatteuse. Il ne s’agit ni plus ni moins d’une chasse aux sorcières maquillée sous la recherche de la justice. Cela reste en tout cas assez basique dans ses fondements pour ne rien évoquer de plus chez le spectateur.
Ca, c’est du braquage !
Death valley est donc une série sympathique qui ne paye pas de mine aux premiers abords, mais montre rapidement sa véritable nature et son potentiel. Doté d’épisodes assez courts, le rythme effréné ne faiblit pas si bien que la succession de fusillades, de règlements de compte et autres routines du flic lambda peut paraître décousue. Toutefois, le scénario au ras des pâquerettes ne propose qu’un intérêt minime, tout comme la pseudo-dénonciation du pouvoir des images. L’humour est l’attrait principal. Il ne fait pas toujours mouche, mais offre un capital sympathie bienvenu, voire salvateur. C’est comme si Police academy rencontrait le cinéma d’horreur au coin d’une ruelle malfamée. Le résultat n’est pas exempt de reproches, mais plaisant et assez jouissif dans l’ensemble.
Un film de Austin Reading, Jordan Vogt-Roberts
Avec : Tania Raymonde, Vene L. Arcoraci, Bryan Callen, Texas Battle