47 meters down
Derrière un nom aussi barbare que la «sharksploitation» se dissimule un sujet bien malmené au fil des décennies, plus particulièrement à partir des années2010 et des bestioles hybrides, possédées ou mutantes qui investissent les DTV. On pensait le genre définitivement enterré dans les affres du bis et du nanar. Toutefois, en 2016, Instinct de survie parvenait pourtant à offrir un sursaut d’orgueil au survival animalier. S’il n’était pas exempt de défauts, le métrage de Jaume Collet-Serra était recommandable à plus d’un titre. Avec 47 Meters Down, la continuité semble de mise avec un huis clos maritime qui ne se situe pas sur un rocher à proximité du rivage, mais dans une cage à requins au fond de l’océan...
Qui observe qui ?
Il est vrai que le cinéma de genre nous a offert quelques incursions plus ou moins notables dans les abysses. Le film éponyme de James Cameron, bien sûr, mais aussi Sphere ou même Leviathan. Néanmoins, le concept interpelle sur plusieurs points. À commencer par la volonté d’un retour aux sources, loin des frasques maritimes de productions abrutissantes. Comme l’exercice l’indique, la survie occupe une place centrale en de telles circonstances. A fortiori quand il s’agit d’un environnement inadapté à la présence humaine. En ce cas, le terme «hostile» s’avance comme un euphémisme puisque le danger provient de tous horizons.
Autre aspect pour le moins notable et contraignant à mettre en scène: réussir à entretenir l’intérêt et la tension dans un lieu restreint non par l’espace, mais les possibilités qu’il offre. Malgré une entame qui occupe près d’un tiers de l’histoire, l’exposition des personnages (également peu nombreux) délaisse les clichés inhérents au genre. Certes, l’on force un peu le trait sur certains points, mais l’ensemble se tient et ne sombre pas dans le pathétique. Une optique nécessaire pour susciter l’empathie lorsque les choses déraillent ou, en l’occurrence, quand les cages sombrent dans les abysses. Et pour cela, 47 Meters Down ne ménage pas ses efforts pour générer le suspense, parfois de manière plus subtile qu’escomptée.
La lumière est au bout... de la crevasse
La progression réaliste et nuancée va multiplier les menaces à différents niveaux. Le matériel tout d’abord. La cage vétuste, sa position au fond de l’océan, la communication radio, mais aussi l’oxygène des deux jeunes femmes. La peur de privation d’air agit comme un fil rouge tout au long de l’intrigue. Elle fonctionne même comme un compte à rebours inéluctable dont on se demande bien qu’elle pourra être la finalité. L’obscurité est un élément peu explicite et pourtant omnipotent. Le silence des profondeurs, la sensation de néant, l’impossibilité d’anticiper d’éventuelles menaces animales... L’appréhension toute psychologique de sortir et d’évoluer dans un tel lieu se rapproche d’une exploration spatiale.
Et les requins? À certains égards, on pourrait presque croire qu’ils sont secondaires. Le fait de se concentrer sur les urgences prioritaires (éviter l’accident de décompression, reprendre contact avec la surface...) leur permet d’endormir notre vigilance. Pour autant, leur présence se rappelle à nous dans les moments les plus inattendus pour mieux surprendre les protagonistes et le spectateur. Les attaques demeurent aussi réalistes que leur apparence. La silhouette massive des squales, leur vitesse et leur voracité font illusion. Les effets spéciaux sont convaincants et entretiennent la vulnérabilité absolue pour ces touristes de l’extrême. Sentiment accentué par l’absence de véritables moyens de défense.
Non, les touristes ne sont pas des appâts à requins
Au final, 47 Meters Down se révèle une très bonne surprise. Sous ses airs de huis clos sous-marin, le film de Johannes Roberts dilue une angoisse primale dans ces eaux abyssales. Si les grands requins blancs restent la figure de proue du danger qui plane littéralement au-dessus des deux sœurs, le simple fait de se retrouver coincé au fond de l’océan est un exercice de survie stressant. En l’espace de 90 minutes, l’intrigue parvient à maintenir le spectateur en alerte, notamment grâce à des séquences aussi oppressantes que variées. Qui plus est, le dénouement s’autorise une petite pirouette narrative étonnante pour jouer avec nos nerfs jusqu’au terme de l’expérience. Il en ressort un habile survival animalier, dont l’originalité rime avec efficacité.