Carrie au bal du diable

En dehors d'un excellent film, on peut retrouver dans Carrie une facette de la réalité que l'on essaye souvent de masquer. On se retrouve ici devant la méchanceté gratuite, la cruauté des ados face à quelqu'un de "différent" (à ceci près que la différence peut se révéler...fatale). Carrie poursuit donc une inexorable descente aux enfers et, lorsqu'elle pense enfin en être sortie, y est replongée par la faute d'une seule personne, lui faisant péter les plombs. Quant à sa mère, elle est la digne représentation des croyants aveugles et puritains à l’extrême. Le final est la digne représentation de ce qui est arrivé à la jeune fille lorsque son monde et sa raison se sont écroulés.

Un film tout en finesse, psychologique. Excellent.

Le scénario est assez fidèle au livre, qui rappelons-le, est construit à partir de coupures de presse. On retrouve donc notre chère Carrie, fille renfermée, souvent prise à parti dans son lycée, boudée par les garçons et, en prime, bousculée à la maison par une mère fanatique, qui voue sa vie au culte de Dieu. L'histoire se prête à beaucoup de messages à faire passer comme les affres de l'adolescence, le fanatisme religieux, ce à quoi il peut nous amener, les conséquences d'une vengeance mal appropriée. Bref, cela aurait pu être un abominable fourre-tout mais c'était sans compter sur la maestria de De Palma.

En effet, me film pose plusieurs questions assez essentiels, au sein d'une Amérique puritaine et où Dieu possède une place importante dans bons nombres de famille, même aujourd'hui. Du coup, malgré la date du film, le coté religieux est toujours d'actualité et peut toucher pas mal de personnes. Tout comme les bals de promo où, bien souvent, certains élèves sont exclus à cause de leur physique ou de leur centre d'intérêt. La réalisation est assez incroyable, De Palma joue beaucoup avec nos nerfs en mettant une musique stridente à chaque fois que Carrie est en passe d'utiliser son pouvoir, ou encore lorsqu'un évènement grave est sur le point d'arriver. Bien entendu, cela serait sans intérêt s'il n'y avait pas avant cela une musique douce et des passages calmes et sereins qui instaure finalement une tension palpable puisque nous attendons le moment fatidique où une chose se passera et notamment la scène du bal.

La scène du bal est d'ailleurs une franche réussite. Cela commence calmement, et même trop bien pour notre héroïne. On attend qu'une seule chose, l'élément déclencheur, le coup du sang de porc. Et lorsque il arrive, le massacre commence et De Palma s'en sort avec les honneurs. Des plans judicieux, des effets spéciaux simples mais efficaces, une lumière rouge qui correspond parfaitement à l'état de colère de Carrie. Et surtout, les effets de caméra avec l'écran scindé en deux pour montrer plusieurs scènes en même temps, ce qui rajoute un effet de peur puisque l'on peut voir que personne ne peut réchapper de ce carnage. La scène finale est aussi très prenante et très surprenante, avec toute la symbolique de la maison qui descend en enfer. Mais est-ce bien l'enfer ou seulement le pouvoir incontrôlable de Carrie?

Les acteurs sont très bons, Sissy Spacek en tête, incarnant une Carrie hantée et désorientée. Mais une mention spéciale à Piper Laurie incarnant une folle religieuse avec talent et crédibilité. Les autres acteurs ou actrices sont plutôt bons même s'ils restent en retrait par rapport à la dualité entre la mère et la fille. Le top étant le look de certains protagonistes, ressemblant vaguement au rocker des années 70 comme Led Zeppelin ou the doors.

Au final, Carrie demeure un excellent film, encore d'actualité aujourd'hui, qui fait honneur au tout aussi excellent livre de Stephen King. Je conseille donc vivement!