Suburban sasquatch

Pour commencer cette critique, je n'irai pas par quatre chemins: Suburban sasquatch est un film nul. Vraiment très nul. La mise en scène est molle du genou, les acteurs en roue libre, le scénario tient sur un confetti, le costume du monstre est à peine aussi effrayant et crédible que celui de Barney le dinosaure et les effets spéciaux sont dignes d'un trip sous acide doublé d'une cuite monstrueuse. Ce film constitue l'un des pires métrages proposés par l'imposant catalogue des Brain Damage Films, pur produit de l'imagination d'un gars qui devait sacrément s'emmerder devant sa télé et qui s'est brusquement dit que ce serait une bonne idée de saisir la caméra avec laquelle il a filmé ses vacances à la campagne et de tourner avec ses potes dans son quartier un film un peu comme ceux qu'on diffuse sur Syfy, le budget en moins (et pourtant) ! Oh que oui, Suburban sasquatch a su exécuter avec brio chacune des étapes de la recette pour faire un monster movie des plus infâmes. Mal réalisé, mal joué, mal monté, que reste-t-il à sauver ? Eh bien, bizarrement, plein de choses en fait...

Bien sûr, ce véritable étron du septième hier ne figurera jamais dans le top 10 cinématographique de qui que ce soit sur cette terre (sauf peut-être les amis du réalisateur). Et prétendre qu'il trouve aisément sa place dans le panthéon des plus beaux nanars de tous les temps serait une hérésie. Cependant, si j'accorde tant de crédit à cet immondice, c'est parce que contrairement à trop de BDFs, on ne s'y ennuie jamais: Dave Wascavage ne lésine pas sur le gore et ose montrer à l'écran des effets spéciaux jamais vu auparavant ! Ainsi, Suburban sasquatch est l'occasion pour vous de voir, pour la première fois, un yéti défoncer une porte en image de synthèse tellement flagrante que l'on parvient même à voir la vraie porte poussé sur le côté ! Mais le carnage ne s'arrête pas là: le yéti soulèvera aussi une voiture de police à la seule force de ses petits bras (voiture manifestement découpée sur photoshop et incrustée par après) et ira même jusqu'à croquer à pleine dents une peluche que le réalisateur tentera tant bien que mal de faire passer pour un chien. On y trouvera également la plus émouvante des scènes de chasses, dans laquelle le sasquatch, plus imposant et terrifiant que jamais (ou sans doute debout sur une chaise puisqu'on voit ses jambes, mais pas celles des chasseurs), témoignera de toute sa fureur en accomplissant l'exploit de pouvoir pousser les acteurs hors du champ de la caméra tout en restant sur place et en poussant des grognements tirés d'on ne sait trop quel survival horror des années 90...

En bref, si vous vous sentez prêt à regarder pendant une heure et demie une grosse peluche d'un grotesque affligeant se balader en banlieue pour foutre du sang en image de synthèse partout et bouffer tout ce qui lui tombe sous la patte, le tout accompagné d'un thème musical que l'on aurait trouvé dans une série Z des années 50, Suburban sasquatch est définitivement le film qu'il vous faut. En revanche, si vous y chercher un vrai film gore ou du réel frisson, vous serez tellement déçu que vous irez sonner chez votre voisin pour lui taper dessus... Véritable massacre cinématographique né de l'enthousiasme d'une bande de copains sans talents ni argent, le film de Dave Wascavage a au moins le mérite de ne proposer que des très peu de temps morts pour un maximum de fous rires. Et pour ceux que ça intéresse, le dvd propose même un making-of ! Mais attention, après une telle expérience, vous risquez d'y laisser pas mal de neurones ! Vous voilà prévenus !