The Longest Nite
Critiques spectateurs
Réalisateur: Patrick Yau Avec Tony Leung Chiu Wai, Lau Ching-Wan, Maggie Siu Mei-KeiInscrivez-vous ou connectez-vous pour ajouter votre avis !
- Connectez-vous ou inscrivez-vous pour publier une critique
Vous souhaitez soutenir Horreur.net ? N'hésitez pas à faire un don, même symbolique, sur Tipee.
publié le 22/04/2008 - 17:15
Polar noir...
publié le 01/01/2007 - 00:00
The Longest Nite
publié le 01/01/2007 - 00:00
The Longest Midnite Express
The Longest Nite, c'est d'abord une plongée abyssale dans la jungle urbaine de Macau. La ville y est glauque, hostile, exiguë, suffocante. Sur ce décor imposant vient se greffer le face-à-face entre le personnage de flic campé par Tony Leung Chiu-Wai et celui de gangster qu'incarne Lau Ching-Wan, véritable fil conducteur de l'intrigue à l'instar du Heat de Michael Mann, un thriller-culte auquel ce métrage doit forcément beaucoup. Quand bien même la psychologie des protagonistes se cantonne ici à un stade sommaire, le duel qui oppose ce policier ripoux dépassé par les événements et ce mystérieux truand au crâne rasé ne manque ni de ressort, ni de subtilité. Mais la force de cet antagonisme réside avant tout dans le jeu exceptionnel du tandem d'acteurs susmentionné, pour lequel on éprouve autant d'antipathie que de fascination. Tony Leung se détache avec brio des performances héroïques ou romantiques exercées chez Woo et Wong Kar-Wai en livrant une saisissante composition de fonctionnaire corrompu. Ne supportant pas la chaleur des lieux, cet inspecteur de mèche avec la pègre du coin s'éponge constamment le visage tout en n'hésitant pas à user de barbarie pour faire avancer le schmilblick. En énigmatique crapule chauve, tatouée et affublée d'un sac de sport nonchalamment soutenu par son épaule, Lau Ching-Wan crève carrément l'écran. Ce rôle, à mille lieues du personnage de gentil flicard au col roulé découvert dans Expect the Unexpected, semble lui avoir été taillé sur mesure tant il fait preuve de charisme et de crédibilité dans son inteprétation.
Qui dit casting en or dit réalisation et scénario en or. Et c'est là que l'éternelle incertitude quant à la paternité du film se manifeste puisque des rumeurs courent comme quoi Johnnie To, crédité en tant que producteur, aurait à plus d'un titre mis la main à la pâte en ce qui concerne la mise en scène de l'entreprise. Alors, de qui entre Patrick Yau, réalisateur officiel de l'œuvre, et l'auteur de PTU découle véritablement la réussite plastique de The Longest Nite ? La question subsiste encore à ce jour. Reste l'esthétique en soi pour nous consoler: photo flamboyante qui fait ressortir toute l'atmosphère des lieux (buildings, autoroutes, ruelles sinistres, appartements crasseux, restaurants et night-clubs mal famés), effets de lumière aussi tape à l'œil que sublimes, mouvements de caméra exaltés, technique virtuose dans l'action (la séquence des miroirs, inspirée de La Dame de Shanghai du génial Orson Welles, le gunfight du commissariat), rien n'est laissé au hasard sur le plan formel. Annexée à ces explorations stylistiques, l'intrigue, établie sur une unité de temps, n'a en regard de son intensité dramatique guère à pâlir face aux traitements de certains modèles américains: l'affrontement des deux personnages principaux, le piège qui se referme peu à peu sur Sam (Tony Leung), les climax dans la voiture et à l'aéroport ainsi que la crudité des scènes de violence forment une combinaison d'ingrédients qui scotche le spectateur à son siège. Avec son budget modeste, sa stature de série B, The Longest Nite en remontre ainsi à bien des productions du genre dotées de moyens autrement plus importants. S'aventurer sur les plates-bandes des autres, c'est cool. Raymond Wong, le compositeur de la bande originale, en sait quelque chose. Entre un piratage osé de l'hymne electro de Midnight Express et une « contrefaçon » de la musique de Rocky, une délicieuse odeur de plagiat typiquement hongkongais se fait sentir. Ce qui, en fin de compte, ajoute au plaisir coupable suscité par l'OST de The Longest Nite, aussi douteuse que résolument variée et omniprésente – on passe de partitions imitées à de la disco-house vintage puis à des thèmes plus ambitieux qui mêlent guitare sèche et mélodies graves au synthétiseur. Voilà un bon témoignage du caractère « éclectique » de ce film, à même d'alterner complaisance, audace, usurpation pure et simple et réelles qualités intrinsèques.
Sombre, envoûtant, excitant, racé et crépusculaire, le polar de Patrick Yau (et/ou Johnnie To ?) se place définitivement sur le haut du podium, suivi de près par Full Alert et The Mission, si l'on évoque la crème du thriller HK des années 90. Au carrefour d'un cinéma d'exploitation louche – on s'approprie les idées des homologues, on filme une cruauté lorgnant vers la Category 3 – et d'un objet artistique au sens littéral du terme – narration en béton armé, duo d'acteurs superbement dirigé, composition visuelle remarquable –, The Longest Nite constitue une œuvre parfaite de bâtardise sur laquelle des cinéastes comme Tarantino feraient bien de prendre de la graine au lieu de s'auto-caricaturer de mal en pis. Un beau tour de force.