Malpertuis

8.5/10
Malpertuis

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Portrait de DorianGray DorianGray
I am Legend - 1998 critiques
publié le 01/01/2007 - 00:00
10
 

Sublime maison

Un film éblouissant (principalement dans sa version originale flamande) remettant au goût du jour les mythes et légendes de l'Antiquité, source principale de l'inspiration de Jean Ray, alias Raymond Kremer, écrivain belge aux moeurs parfois peu srupuleuses (jugé pour malversations et détournements d'argent auprès d'une société de publication). Kumel signe ici une excellente adaptation - trahison du chef d'oeuvre de l'auteur flamand, traduisant les innovations romanesques en autant d'innovations scénaristiques (notemment dans les rôles joués par la divine Susan Hampshire) : en effet, si le livre fait transparaître le peu de foi dans ce matériel en une kirielle de narrateurs différents comportant chacun leur propre perception, le film démultiplie complétement les personnages de manière à rendre plus plausible la finale apportée par Kümel. Une ronde d'acteurs de grand talent (Orson Welles, Jean-Pierre Cassel, Michel Bouquet, Sylvie Vartan et même Johnny Halliday ou l'incomparable Dora Van Der Groen) marque également ce film étrange et puissant. Certes, les apprentis jugeront ce film comme un enième scénario de maison hantée vaguement décoratif, mais il n'en est rien ... si cette maison est hantée, elle ne l'est que par l'oncle Cassave, tyran diabolique et plusieurs fois centenaire, la seule chose hantée dans ce film est ... la mémoire! Ce que démontre clairement la tannière de Malpert Huis (ce qui signifie la maison du mauvais passage, la tannière de Renart, le célèbre esprit diabolique du conte médiéval) à travers sa cuisine démoniaque et suintante, ses couloirs immenses et tristement vides, mal éclairés, ses pièces sombres et lépreuses, ses escaliers noirs et terrifiants. Ce film est une pure réussite du seul point de vue décor (ce qui est normal, puisque Kümel est décorateur au départ) car il respecte parfaitement les codes établis par Ray tout en accordant une attention particulière à chaque personnage : ainsi, chaque rôle reçoit sa propre lumière (verte pour Dideloo-Bouquet, blanche pour Yann-Carrière, orangée pour Euryale-Hampshire ...). La finale trop souvent critiquée de facile et de baclée relève en fait du plus pur génie : la première grande caractéristique du fantastique étant le manque de foi primordial des acteurs, la finale ne doit pas révéler complètement la solution à l'énigme. Ainsi, il importe de laisser le lecteur aussi neutre que possible, il ne peut à aucun moment être certain de l'histoire qu'il vit. Et de ce seul point de vue, Kümel rattrappe la bourde réalisée par Ray : donner confirmation des évènements qui se sont passés dans la maison. Selon certains, Yann termine une histoire dans un asile et est donc fou (d'où la dernière scène), pour d'autres, Malpertuis existe bel et bien mais est inscrite au plus profond de nous (d'où le retour de Yann à Malpertuis). Quoi qu'il en soit, voici une oeuvre réussie, une trahison sincère et plus que valable dont on retiendra surtout et malheureusement les prises de bec inévitables entre Kümel et Welles (toujours trop prompt à s'imaginer être le centre du monde).
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