Blood Glacier
Hormis le slasher Trois jours à vivre et de modestes exceptions, le cinéma autrichien n’est guère prolifique en matière de films d’horreur. Très discret sur la scène internationale, ce type d’initiative ne dépasse guère le tour des festivals ; au mieux, une sortie en DTV. Après s’être attelé aux zombies avec Rammbock, Marvin Kren se penche sur le survival animalier en milieu hostile. Faute d’innovations ou d’une volonté évidente à offrir une histoire sérieuse, on sait le genre à bout de souffle depuis de nombreuses années. Il existe bien quelques sursauts d’orgueil, mais dans l’ensemble, des productions signées Asylum ou SyFy ont tôt fait de décrédibiliser les attaques animales sous couvert d’un pseudo-divertissement bâclé.
Du sang ! Du sang ! Du sang !
En l’occurrence, Blood Glacier n’a d’autres ambitions que de retrouver l’esprit des années 1970-1980 en l’intégrant dans un contexte contemporain. À savoir, les préoccupations du réchauffement climatique et son impact sur les glaciers du globe. Pour ce faire, l’intrigue prend place dans les Alpes autrichiennes. On a pu l’évoquer souvent, le fim de Marvin Kren se rapprocherait de The Thing. Dans les intentions, peut-être. Dans le cadre glacial, sûrement. Dans le résultat à l’écran, c’est beaucoup moins évident. Malgré l’apparence difforme des créatures mutantes, l’ambiance paranoïaque propre au film de Carpenter est ici totalement absente.
Si la contamination est possible de l’animal à l’homme, et inversement, cet aspect de l’histoire n’est jamais développé dans le sens où les personnages se sentent menacés par leur semblable. On retrouve néanmoins le côté passionné du cinéaste qui n’hésite pas à multiplier les références. Le fait que la nature se retourne contre l’homme laisse à penser à Long Week-end de Colin Eggleston. Quant à la présence des scientifiques et la responsabilité de l’homme face aux dérèglements qu’il cause, on peut songer à Isolation. D’ailleurs, l’atmosphère dans un cadre restreint, sans pour autant être un huis clos, est également similaire ; tout comme la dégénérescence génétique de la faune locale en lieu et place du bétail.
Il vaudrait mieux éviter de décortiquer le problème...
En dépit de nombreuses références, Blood Glacier tente néanmoins de se forger sa propre identité, notamment en se concentrant sur l’étrangeté de son propos. Loin d’être farfelue, l’explication du concept trouve une résonnance réaliste, à tout le moins plausible. Pour ne rien gâcher, cela permet d’ajouter une certaine variété dans les attaques et dans la représentation des créatures mutantes. On a donc droit à des amalgames génétiques complètement inattendus, comme le « renard scarabée », les moustiques géants ou la larve qui évoque le « facehugger » d’Alien. Cerise sur le gâteau, l’aspect artisanal de la production se pare d’effets spéciaux à l’ancienne et d’animatroniques en lieu et place des images de synthèse.
On tiendrait là une excellente surprise surgie de nulle part. Et pourtant, il est difficile de faire l’impasse sur des écueils prépondérants pendant toute la durée du film. À commencer par une galerie de personnages bancale. Entre caricature et héroïsme inconsidéré, la caractérisation souffre de nombreux problèmes. La faute à un manque de développement. De plus, on distingue une touche humoristique qui prend de l’ampleur au fil de la progression. Le résultat ? Une conclusion à contre-courant des intentions initiales qui tient davantage du bouclage rapide que d’une réelle interrogation sur les conséquences de l’activité humaine. Là n’est pas forcément la question, mais le sujet principal s’y prêtait.
Et de prendre le bouquetin par les cornes !
Avec son idée de départ et son traitement globalement convaincant, Blood Glacier parvient à se démarquer dans une certaine mesure. L’intrigue reste équilibrée dans sa progression, tandis que les attaques animales sont bien amenées. Le fait de répondre à de faibles moyens par des trucages sans images de synthèse (ou presque) s’avère une excellente alternative. Toutefois, les protagonistes manquent de consistance et l’aspect second degré qui gangrène la dernière ligne droite empêche le film de se hisser au statut d’incontournable. Au regard de ce que l’on nous inflige actuellement, il demeure néanmoins une production différente et passionnée que les amateurs de survival animalier apprécieront à sa juste valeur.
Un film de Marvin Kren
Avec : Gerhard Liebmann, Edita Malovcic, Hille Beseler, Brigitte Kren