The Predator
Alors que les deux premiers films s’étaient avérés marquants à bien des égards, la saga Predator a progressivement décliné vers les affres du bis. La faute à des problèmes de production divers et aux spin-offs Alien Vs Predator dont la médiocrité intrinsèque était difficilement surpassable. Fort heureusement, le troisième opus rattrapait un tant soit peu la débâcle avec une incursion globalement intéressante. En général, quand on touche le fond, on ne peut que remonter. Seulement, dans le cinéma, il y a toujours un moyen de creuser un peu plus profondément dans la bêtise humaine. Force est de constater que ce quatrième volet place la barre très haute en terme d’absurdités.
Quand on autopsie un mythe, c'est la catastrophe assurée...
Rarement de telles ambitions ont pu paraître antinomiques par rapport aux fondamentaux de la saga pour justifier une tentative aussi pathétique. D’emblée, on se heurte à une introduction ultra-référentielle qui essaye de réaliser un copier-coller des moments iconiques du film de John McTiernan. La jungle en guise de terrain de jeu, un commando d’élite et un naufrage intergalactique... Le manque d’inspiration est flagrant et se rappelle à notre bon souvenir à intervalles réguliers. On nous balance quelques clins d’œil çà et là et des répliques cultes qui, ici, n’ont aucune résonnance particulière. Quant à la bande originale, on constate le même problème avec un décalage éhonté entre la musique et les séquences.
À la rigueur, on aurait pu faire l’impasse sur l’absence de scénario pour y trouver un divertissement basique. Mais c’était sans compter les velléités de Shane Black pour insuffler un humour complètement hors contexte. À quel moment a-t-on l’idée d’assimiler l’univers de Predator à une comédie bas du front ? Comment peut-on transformer un véritable mythe de la science-fiction en une truculente promenade nocturne ? Outre une équipe de bras cassés dont les compétences sont pour le moins douteuses, les réparties sont d’une bêtise sans nom. Quelques allusions sexuelles, une philosophie de comptoir, des échanges aussi stériles qu’inutiles...
Haut les mains ! Enfin, sans le type au bout des doigts...
Hormis quelques confrontations assez violentes, on pourrait presque se croire devant un film familial. La présence d’un jeune autiste et les prétextes narratifs pour la justifier vont de pair avec un déroulement en roue libre, dépourvu de structure et de rigueur. L’équipe préfère enchaîner les gags plutôt que se pencher sur la traque. Il n’y a rien de pire qu’une histoire bavarde qui n’a rien à raconter et c’est précisément le cas de The Predator. Les considérations d’une troupe de soldats dérangés du bulbe, les réflexions sur l’origine et les motivations des predators et les tentatives pseudo-complotistes du gouvernement pour étouffer l’affaire font peine à contempler.
Et comme un mauvais film ne fait jamais les choses à moitié, on a droit à une démystification du mythe en bonne et due forme. On nous dessert des arguments et des explications à l’emporte-pièce sur la raison des chasses de predators, sans oublier des projets d’invasion sous couvert de manipulations et d’amélioration génétiques. Parler de crédibilité dans ces conditions n’a aucun sens. Et que dire de ces «chiens predators»? On ne sait pas ce qui est le plus triste: les dreadlocks sur la tête d’un canidé extraterrestre, leur domestication par de «super predators» (quelle imagination !) ou l’apprivoisement par des humains.
A la niche !
Au final, The Predator mérite amplement sa piètre réputation. Véritable navet de luxe sans le moindre fond ni intérêt, le film de Shane Black est un ratage complet. L’aspect référentiel ne rend guère hommage aux précédentes productions, mais dissimule avec maladresse la pauvreté scénaristique et l’outrage cinématographique. De manière récurrente, on dédramatise la violence sous couvert d’un humour pénible qui ne fonctionne à aucun moment. La succession de tares s’enchaîne tant et si bien qu’on a du mal à recenser tous les affronts et les bévues. Non seulement il n’y a plus rien d’angoissant, mais la chasse des predators est dénuée de toute subtilité. Tout juste se contentent-ils de foncer dans le tas sans réfléchir. Un peu comme ce film, détestable au possible.
Un film de Shane Black
Avec : Boyd Holbrook, Olivia Munn, Thomas Jane, Alfie Allen