Sharkenstein
Au fil des années, la sharksploitation est devenue un courant « cinématographique » uniquement motivé par l’appât du gain. Le prétexte est facile pour jouer de surenchère dans le grand n’importe quoi. « Vous êtes réalisateur sans talent et sans projet ? Vous n’avez pas de moyens, encore moins d’idées pour amalgamer un semblant de scénario ? Le film de requins est fait pour vous ! » Tel pourrait être le slogan de Polonia Bros. Entertainment. Un studio de production qui ferait passer les bévues Asylum et SyFy pour de bons moments, sans second degré aucun. C’est dire le niveau de bêtise que l’on atteint en l’espace de 70 minutes de programme avec Sharkenstein !
On aime ces entrées en matière soignées
D’emblée, on se confronte à un propos d’une rare débilité. Sous couvert d’une approche pseudo-référentielle aux films de monstres d’Universal, Sharkenstein amalgame grossièrement des morceaux de cadavres putréfiés de squales pour créer une bestiole qui ne ressemble à rien, littéralement. Il est plus que probable que le procédé ait été similaire pour jeter sur papier les bribes d’un semblant d’histoire. Le propos n’est même pas drôle tant il se révèle pénible et affligeant. On ne peut pas concevoir un projet cinématographique sur la simple base d’une vision décérébrée de l’écriture. À quel moment peut-on pondre pareille imbécillité ? À quel moment envisage-t-on de la produire ?
Vraisemblablement, la bêtise humaine nous surprend toujours, dans le mauvais sens du terme. À cette occasion, chaque séquence repousse plus loin les limites de l’imaginable. On se dit que l’on touche le fond avant de constater que la suite des évènements est pire que les faits précédemment évoqués. Si Mark Polonia se montre polyvalent, cette qualité s’exprime uniquement dans son incompétence. Ce réalisateur de pacotilles est incapable d’assimiler les bases du cadrage et abuse des plans rapprochés afin de rendre l’action illisible. Le montage est effectué sans cohérence avec un logiciel open source qui permet d’afficher des transitions « gouttes d’eau » ou « vague » pour smartphone.
Une idée de la qualité de la réalisation et des attaques du requin...
La plupart des situations sont mal amenées et ne présentent aucun intérêt, même dans l’enchaînement des invraisemblances à venir. Cela vaut aussi bien les frasques sur un plan d’eau qui ressemble à un ridicule étang que la chasse au requin terrestre qui tente de conclure sur la référence de Frankenstein. Les brochettes d’amuse-bouche à l’écran sont incapables d’aligner deux phrases avec le ton juste. Leur allure de bovidés les assimile très rapidement à des hors-d’œuvre pour squales. Là encore, un tel casting n’est même pas fichu de gérer l’espace du cadre, ne serait-ce que marcher avec un minimum de naturel. Inutile de parler d’expressions faciales dont ils sont apparemment dépourvus.
Au sortir de telles considérations, le requin ne ressemble à rien. Les rares plans sous-marins ondoient constamment et donnent la nausée. En l’occurrence, on ne peut définir comme telles des images de synthèse, car le squale s’apparente à un jouet en plastique que l’on agite à bout de bras, sans moquerie aucune. Il ne présente aucune animation et gobe ses victimes en moins d’une seconde, hors champ à l’appui. Les incrustations sont calamiteuses et affichent les pires décalages que l’on peut contempler entre ce qui est filmé et les éléments ajoutés par la suite. Mention spéciale aux rares CGI du métrage : les flammes des torches. Vraisemblablement, il n’y avait plus assez de budgets pour s’acheter une allumette.
La bête dans toute sa splendeur !
Au final, Sharkenstein s’avance comme un cas d’école. Mark Polonia signe l’une des pires frasques que l’on puisse concevoir dans le domaine du cinéma. Le nombre d’idioties et d’incohérences à la minute demeure effarant. À aucun moment, on n’entrevoit un semblant d’espoir, un semblant d’intérêt ou d’implication de la part de l’équipe de tournage. Il n’y a aucune mise en scène, pas l’once d’une direction d’acteurs, encore moins d’effets spéciaux médiocres ou d’histoires. Sharkenstein, c’est avant tout un festival de stupidités en tout genre. Une incursion dans les affres innommables de la bêtise humaine dont on n’en ressort pas indemne tant cette « découverte » se révèle éprouvante et dangereuse pour les neurones.