Kinatay
Pour arrondir ses fins de mois, un futur policier, jeune père et récemment marié, participe à quelques rackets. Un soir, un sergent de police l'engage pour une mission plus risquée.
Si l'office de tourisme philippin cherche un film pour attirer de riches étrangers, il est certain qu'il ne se servira pas de ce métrage, qui n'hésite pas à décrire la crasse et le bruit inondant chaque mètre carré des rues de Manille.
Mais dégoûter les touristes est il le but de Kinatay ? En fait, au bout de cent minutes de film, on pourrait presque y répondre par l'affirmative tant ce métrage est long, creux et ennuyeux.
Kinatay, qui signifie massacre, raconte l'histoire d'un jeune homme, élève à l'académie de police, dont la vie va basculer dans un cauchemar sans fond suite à une virée nocturne sanglante.
Le métrage démarre par le mariage du jeune homme. On y voit des cérémonies à la pelle dans une mairie surpeuplée, puis un repas de noces dans ce qui ressemble à une cafétéria. Le réalisateur cherche sans doute à nous prouver le cadre de vie difficile dans lequel se situe un jeune couple, de nos jours, dans son pays. Mal filmé (caméra tremblante), assourdissant (les bruits de bus délabrés, la foule amassée sur les trottoirs), ce premier tiers de métrage est navrant de banalité.
La seconde partie semblait plus prometteuse. On se retrouve dans un bouge des quartiers chauds de la ville, et le groupe de policiers embarque une prostituée qui leur doit beaucoup d'argent.
Néanmoins, une fois cette junkie kidnappée, on retombe dans une absence totale de rythme et avons droit à une demi-heure de route dans les embouteillages de Manille. Aucun dialogue digne d'intérêt ou action significative ne viennent troubler cette morne succession d'images que l'on pourrait voir dans les documentaires de M6 le dimanche soir sur les trafics en tous genres dans les pays du tiers monde.
Au bout d'une heure, le métrage semble enfin vouloir commencer, avec une forme de torture porn. Toutefois, l'interrogatoire et le reste sont filmés de loin par un Brillante Mendoza qui porte bien mal son prénom. La distance permet tout de même de ne pas trop voir le manque de réalisme de la scène de découpage de la victime, évoquant celles du nanardesque 2000 Maniacs. Peu choquante pour les habitués du genre, cette torture n'apportera rien de nouveau, loin de là.
Après tout ça, il est grand temps de rentrer à la maison ! Bien évidemment, il faudra se débarrasser du cadavre, jeté par petits morceaux tout au long du retour, presque aussi ennuyeux que l'aller.
Si Mendoza tente de nous répugner en faisant de ce cadavre mutilé une simple ordure, il oublie sans doute que moults cinéastes ont déjà été plus loin que lui dans la déshumanisation. Le fait que les tueurs soient des policiers arrondissant ainsi leur fins de mois n'est pas non plus une révolution, surtout dans des pays pauvres.
Métrage primé à Cannes en 2009 (meilleure mise en scène), Kinatay, à l'image d'un épilogue d'une grande inutilité, démontre que le festival cannois sait aussi récompenser des films étrangers d'une rare pauvreté.
Plus mou qu'un épisode de Derrick, ce film peine trop à trouver son rythme, hésitant indéfiniment entre drame social et film de violence urbaine, là où un film comme La Zona, Propriété Privée, du mexicain Rodrigo Pla, faisait merveille. De plus, ses personnages ne sont guère attachants, malgré une facture réaliste évidente.
En résumé, bien qu'inspiré d'un fait réel, Kinatay se révèle être un produit long et maladroit, qui s'oublie aussitôt le générique de fin engagé.
En effet, si vous recherchez du torture porn, autant revisionner le premier Guinea Pig, qui a le mérite d'entrer tout de suite dans le vif du sujet. Si vous recherchez des oeuvres intimistes et sociales, d'autres métrages démontrent avec davantage d'efficacité la cruauté de notre société actuelle.
Un film de Brillante Mendoza
Avec : Mercedes Cabral, Julio Diaz, Jhong Hilario, Maria Isabel Lopez