Hemlock grove
Tout comme les vampires et autres créatures de la nuit, les loups-garous disposent d'un capital sympathie indéniable et ont depuis longtemps inspiré la culture populaire. Le cinéma n'échappe pas à la règle, la télévision non plus. En général, les séries laissent notre bon vieux lycanthrope au second plan, notamment dans les adaptations de la bit-lit (Vampire diaries, True blood...). On remarquera quelques exceptions comme La malédiction du loup-garou ou le plus dispensable et néanmoins cocasse Le loup-garou du campus. En tous les cas, un constat s'impose : le thème est surexploité et n'a presque plus rien à offrir. Ce n'est pas pour autant que les producteurs traînent la patte pour nous pondre de nouveaux projets.
Vous pouvez entrez, mais vous en ressortirez assez vite.
En dépit d'un pitch de départ sans surprise, Hemlock Grove intrigue. Nous nous retrouvons dans cette petite bourgade isolée où une succession de meurtres effroyables ébranlent la communauté. Devant la sauvagerie perpétrée, cela ne peut être que l'oeuvre d'une bête. De là à penser qu'il s'agit d'un loup-garou, il n'y a qu'un pas. On se demande en quoi cette nouvelle série pourrait se démarquer. Est-ce son scénario qui donne envie de la découvrir ou l'un de ses producteurs (et réalisateur du premier épisode) : Eli Roth ? Le nom du cinéaste aidant, on se risque à s'aventurer dans ses mornes contrées. Et mornes, elles le sont à n'en pas douter.
En effet, on déchante très rapidement. Certes, le pilote fait office d'amuse-gueule avec l'exposition du contexte, des personnages et de la première victime. Les premières minutes distillent une atmosphère étrange, presque inquiétante. L'histoire est agencée de manière à intriguer et vouloir la poursuivre plus en amont. En cela, les bases posées s'avèrent plutôt bonnes. Seulement, la série s'essouffle dès le deuxième épisode et s'enfoncera dans l'ennui et la paresse. La faute incombe à un scénario finalement creux qui ne ménage aucun suspense. La traque du loup-garou en devient presque secondaire et peine à tisser le fil rouge entre les différents points de vue.
Déguisée en fées, on joue les mijaurées.
L'on s’attarde davantage sur les amourettes de pacotilles ou les séances de culbutes entre les protagonistes plutôt que sur la présence du danger ou les investigations pour traquer la bête. C'est bien simple, le récit se révèle tellement maigre que l'on nous inflige plusieurs séquences de copulations (très soft et peu explicite au demeurant) à tous les épisodes. On ne sait pas quoi raconter alors autant que les personnages s'amusent. Untel couche avec la mégère de service, le fils à papa refuse que sa cousine se tape son meilleur ami gitan, mais lui se permet de faire un peu tout et n'importe quoi. Une auteure en herbe découvre l'amour en la personne d'un jeune homme galant... Et cela n'en finit pas.
Si le départ laissait à penser à un croisement entre Twin Peaks et American horror story (le second degré aux oubliettes), on songe ensuite à un hybride entre Vampire diaries et Les feux de l'amour. Quand il ne s'agit pas de conflits sentimentaux, on nous inflige des flashbacks qui entrecoupent un rythme amorphe et n'apporte rien à l'intrigue. Pis, ils rendent même la narration encore plus brouillonne et monotone qu'elle ne l'était déjà. À cela, l'on ajoute une jeune adolescente engrossée par un ange (ce n'est pas l'Immaculée Conception), une chasseuse de loup-garou (sorte de Van Helsing des temps modernes, le charisme en moins) et les expériences d'un laboratoire peu scrupuleux. C'est alambiqué, peu crédible et surtout mal fichu.
Un petit steak pour faire passer la faim ?
Pour compléter le tableau, les personnages sont loin d'être inoubliables. On les dirait tout droit sorties d'une fabrique à stéréotypes. Le gitan au regard sombre, son ami richissime, la mère acariâtre (une bien pâle Famke Janssen qui nous avait habitués à bien mieux), un psychologue coureur de jupons et les salopes de service sont autant de clichés pénibles à contempler. D'ailleurs, les interprètes sont loin d'être impliqués et charismatiques. Ils se complaisent dans des rôles sans doute à leur image et ne parviennent à aucun moment à retenir l'attention. Bref, des individus sans âmes et inintéressants.
Qui plus est, les lignes de dialogues sont d'une platitude effarante. Lorsqu'ils ne se regardent pas dans le blanc des yeux, l'on a droit à des « Alors, tu veux qu'on baise ? » « Quoi, je ne te plais pas ? » ou les très inutiles « Ca va aller. Je suis là pour toi. » « On fait quoi, maintenant ? » Un grand classique celui-là ! Il nous reste le loup-garou qui sauvera peut-être la série du naufrage ? Certes, la métamorphose est réussie, plutôt saisissante dans son genre. Néanmoins, la bête ne se montre que trop rarement et, lorsque c'est le cas, il s'agit au final d'un simple loup. En ce qui concerne la violence, elle est très édulcorée. Les attaques sont trop rapides et pas du tout inventives.
On la profane ou pas cette tombe ?
Bref, Hemlock grove est une cruelle déception. Alors que les débuts nous laissaient penser à une approche « Lynchienne », tout en retenue et bizarre sur le mythe du loup-garou, la suite nous inflige désillusion sur désillusion. Le scénario, creux et prévisible, n'est qu'un ramassis de clichés sur fond d'amourettes exaltantes. L'on s’ennuie ferme et même les conclusions des épisodes ne donnent nullement envie de poursuivre l'aventure. Au lieu de se concentrer sur le véritable fond (les meurtres et l'éventuelle présence d'un loup-garou), l'intrigue s'appesantit sur des détails inutiles pour tenter de pallier à un manque d'inventivité flagrant. Une série télévisée facile et fastidieuse.
Saison 2 : 4/10
Saison 3 : 3/10
Un film de Deran Sarafian, T.J. Scott
Avec : Eliana Jones, Emilia McCarthy, Aaron Douglas, Famke Janssen