Bates Motel - Saison 5
Exercice délicat que de conclure une série. Sans compter la réception auprès du public qui permet à la production de perdurer, il est nécessaire de savoir s’arrêter au bon moment afin d’éviter déceptions et qualités initiales bâclées. De plus, l’intrigue doit être l’aboutissement d’autant d’années d’efforts (en l’occurrence, cinq pour Bates Motel) tout en offrant un épilogue crédible. Qui plus est, la présente série s’inspirant du roman de Robert Bloch et du chef d’œuvre d’Hitchcock doit être en mesure de proposer une continuité naturelle. Car, si l’histoire a subi un petit lifting pour être recadrée dans un contexte contemporain, il n’en demeure pas moins qu’elle reste une préquelle à Psychose pour faire la lumière sur le passé de Norman Bates.
No vacancy ?
À quelques exceptions prêtes, la folie de ce dernier a été majoritairement sous-jacente au fil des saisons. Quitte parfois à sombrer dans une trame statique et trop longue, comme au cours de la saison3. Ici, elle atteint son point d’orgue avec un Norman que l’on devine proche de l’interprétation d’Anthony Perkins. Et cela ne vaut pas uniquement pour le physique particulier de Freddie Highmore. On peut saluer la prestation impeccable de l’acteur, mais surtout l’orientation tourmentée que le personnage emprunte. Écartelé entre sa schizophrénie et la possibilité d’une vie «normale». Certes, on s’en est éloigné depuis bien longtemps et, par souci de cohérence, le devenir de Norman Bates ne fait pas l’ombre d’un doute.
Pour autant, quelques éléments subsistent. Afin de mieux se rappeler à lui et aux spectateurs, on songe notamment à sa relation avec son demi-frère. Étant l’origine de sa névrose, celle qu’il entretient avec sa défunte mère prend le pas sur des échanges plus rationnels. L’intrigue met l’accent sur l’aspect psychologique pour monopoliser l’attention, quitte parfois à délaisser une subreptice atmosphère glauque. Là où les autres saisons équilibraient l’importance des protagonistes, développant par la même la mythologie autour du Bates Motel, on comprend que cette ultime incursion se recentre sur l’univers de Norman Bates. Les différents intervenants gravitant tant bien que mal dans son giron.
L'accueil était pourtant chaleureux
Il n’en demeure pas moins que chacun occupe la place qui lui incombe. On pourrait même y voir quelques symboles représentant une facette de la personnalité de Norman. Par exemple, l’asociabilité et la marginalisation chez Chick Hogan. Le pragmatisme et le sens des valeurs avec Alex Romero. D’autres aspects sont plus ou moins flagrants ou subtils. Toujours est-il que chacun d’entre eux trouve ici un épilogue à leur mesure. La cohérence des faits parvient à creuser leur caractère afin de concevoir ce qui leur advient. Cela prévaut pour la trame narrative et pour les événements à venir, ceux-là mêmes qui laissent entrevoir une lueur d’espoir ou de ténèbres sur leur avenir.
Pour cela, ces dix derniers épisodes disposent d’une construction plus maîtrisée qu’auparavant. Un élément qui avait déjà fait l’objet d’améliorations lors de la précédente saison. Ici, la décomposition fait montre de pertinence pour mieux travailler le suspense. La tension s’appuie sur des enjeux qui tiennent davantage des conséquences et non des causes. L’intégralité de la saison s’axe comme une grande conclusion avec, à la clef, des aboutissants sur lesquels on peut enfin mettre un point final. Les scénaristes ne laissent aucune porte ouverte, si ce n’est celle destinée à mener à Psychose. N’en déplaise à quelques libertés prises avec le matériau original en guise de références ou d’éléments pour crédibiliser l’ensemble. Comme certaines victimes de Norman.
Une complicité qui perdure envers et contre tout
Si Bates Motel a pu afficher une image inégale au fil de ses saisons, l’intérêt périclitant à la troisième itération, cette ultime saison rehausse le niveau initié par son prédécesseur. Véritable conclusion qui ne laisse que peu de place aux spéculations, Bates Motel s’achève de fort belle manière. L’histoire écartèle les destins qui ont pu se croiser au bout de cinq ans. Les uns profitant d’un épilogue heureux, les autres... Celui que nous connaissons sous des latitudes différentes. Un dénouement qui survient au bon moment pour faire de Bates Motel une série de qualité, et ce, malgré quelques errances par le passé.
Un film de Tucker Gates, Ed Bianchi
Avec : Freddie Highmore, Vera Farmiga, Max Thieriot, Olivia Cooke