Une Epine d'Amour
Une fois n'est pas coutume, pour commencer cette critique, j'aimerais m'excuser d'avance auprès des techniciens, acteurs, scénaristes,...etc, bref, j'aimerais m'excuser auprès de tous les intervenants qui ont sué sang et eau sur ce film pour les mots durs qui vont suivre.
Je déteste critiquer les petits métrages indépendants tournés et montés au forceps, car c'est déjà un exploit en soi de les compléter et de les voir distribués. Seulement, puisque Une épine d'amour est présenté (et vendu) sur un pied d'égalité par rapport à d'autres bons films professionnels (The Woman, par exemple, pour rester dans le catalogue du distributeur Emylia), je me dois de le critiquer en tant que tel.
Et là, sortez les mouchoirs, car le constat est sans appel.
Une épine d'amour raconte les déboires et les problèmes familiaux d'une fille, Lysa, la trentaine fatiguée, droguée, de son ami d’enfance Jack, un dealer et de Chris, un être cher à Lysa, policier dans le Marseille du début des années 2000, où beaucoup de personnes se droguent encore, à l'abri des regards dans les vieux quartiers de Marseille...
Je ne sais pas ce qui est le plus difficile à supporter durant le visionnage d'une épine d'amour : la médiocrité technique de l'ensemble ou l'amateurisme de l'écriture ? Car les deux souffrent de lacunes rédhibitoires, impossibles à outrepasser pour apprécier le spectacle.
Commençons par le plus frappant, le premier qui saute aux yeux (et aux oreilles) : l'aspect technique. Il semblerait que la plupart des séquences sonores aient été réalisées en prise de son directe, c'est-à-dire sur le plateau de tournage avec des micros, à l'exception de quelques lignes ajoutées en post-production. Le problème, c'est que le rendu n'est pas bon. Les micros utilisés étaient-ils de mauvaise qualité ? Trop petits ? Pas adaptés ? Volonté d'augmenter le côté "réaliste" du film ? Mystère. Quoi qu'il en soit, nombre de dialogues sont tout simplement inaudibles, soit à cause de la réverbération, soit au cause d'un volume sonore tout simplement trop bas.
Ajoutez à cela une musique envahissante et vous obtenez un sacré calvaire auditif.
Notons tout de même de bons points au rayon visuel, car la photographie est de bonne qualité, ce qui n'est pas négligeable pour un film se déroulant la plupart du temps de nuit ou dans des endroits glauques. Marseille by night, ça vaut le détour.
Cela étant, si l'enrobage avait été le seul élément déficient de Une épine d'amour, la pilule aurait peut-être pu passer, d'autres films l'ont déjà fait, (Zombies Anonymous, par exemple), mais outre la forme, le fond pose également problème.
L'histoire était potentiellement intéressante, mais ne s'avère pas toujours compréhensible, la faute à un scénario bien trop mal construit et chiche en rebondissements pour être prenant.
Ensuite, les scènes duuuuuuuuuuuuuuurent au-delà des limites du supportable. Quelques exemples :
- Après le film, vous saurez tout sur la manière de vous piquer à l'héroïne. On en voit en effet toutes les étapes en temps réel.
- On a droit une interminable séquence de 5 minutes de dialogues en espagnol (?)... argh !
- On "visite" une gare en compagnie d'un des personnages.
Et tout cela pour aboutir à une fin sans queue, ni tête...
Du côté des acteurs, certains s'en sortent bien, telle que Jenny Antoine, impeccable en junkie, tandis que d'autres frisent la correctionnelle. Je pense notamment à Jean-claude Schembri dont certains dialogues ont d'ailleurs été retravaillés à la machette en post-prod. En gros, on alterne entre le bon et le mauvais.
On appréciera la présence d'un acteur connu venu donner un coup à de jeunes cinéastes (Ambroise Michel de Plus Belle la Vie), mais on aura le droit de rester circonspect devant l'intervention vocale moyennement amusante de Daniel Beretta, célèbre pour être la voix officielle française de Arnold Schwarzenegger.
Comme je l'ai dit plus haut, je déteste critiquer des films tel que Une épine d'amour. Car contrairement aux daubes de chez SyFy ou aux films opportunistes made in Asylum, la sincérité transpire de chaque centimètre de la pellicule. On sent réellement la volonté de l'ensemble de la production pour offrir un spectacle poignant, sincère, touchant, qui veut faire réfléchir et interpeller son public sur l'enfer de la drogue. C'est donc un véritable calvaire pour moi de démolir ce film.
Cela étant, il est à noter que la totalité des bénéfices de la production et des ayants droits seront reversés à une association qui lutte contre la toxicomanie. Donc même si le film n'est pas très bon, n'hésitez pas à vous le procurer. Cela encouragera, en outre, l'éditeur Emylia à continuer de soutenir le cinéma indépendant en sortant régulièrement les premières oeuvres de jeunes talents.
Un film de Ludovic Bornes
Avec : Jenny Antoine, Jean-Claude Schembri, Pierre Kunz, Daniel Beretta