Harry Potter et le Prince de Sang Mêlé
Qu'est-ce qui fait une bonne adaptation de roman? C'est la question sans réponse que se posent tous les amateurs de cinéma depuis que le 7ème art s'est mis en tête de porter sur grand écran les écrits les plus populaires. Certains vous diront que c'est le respect de l'histoire, d'autres que c'est le respect des thèmes du bouquin et d'autres encore que l'on s'en fiche tant que le film est bon. C'est vrai que certaines adaptations étaient très réussies malgré le peu de respect de l'oeuvre originelle (Shining notamment) tandis que d'autres étaient horriblement foirées alors qu'elles ne s'écartaient jamais du matériau de base (Prisonniers du temps par exemple).
Bref, une bonne adaptation c'est avant tout un bon film. Dans ce cas, Harry Potter et le prince de sang-mêlé est non seulement un film moyen mais également une adaptation incroyablement ratée! Explications...
Tom Jedusor adolescent...
L'étau démoniaque de Voldemort se resserre sur l'univers des Moldus et le monde de la sorcellerie. Poudlard a cessé d'être un havre de paix, le danger rode au coeur du château ... Mais Dumbledore est plus décidé que jamais à préparer Harry à son combat final, désormais imminent. Ensemble, le vieux maître et le jeune sorcier vont tenter de percer à jour les défenses de Voldemort. Pour les aider dans cette délicate entreprise, Dumbledore va relancer et manipuler son ancien collège, le Professeur Horace Slughorn, qu'il croit en possession d'informations vitales sur le jeune Voldemort...
Dumbledore, plus consterné que jamais...
Le sixième roman de la saga Harry Potter est sans conteste l'un des meilleurs, si pas le meilleur. Pourquoi? Parce qu'il est sombre à souhait, intense, imprévisible et extrêmement accrocheur. En clair, il est tout ce que son homologue sur grand écran n'est pas. En effet, dans cet épisode, on était censé nous révéler toute la jeunesse de Voldemort, depuis la mort de ses parents jusqu'à son ascension en tant que seigneur des ténèbres. Et ceux qui ont lu les livres savent à quel point cette histoire s'avère IN-DIS-PEN-SABLE pour la suite, notamment pour la recherche des fameux horcruxes. Eh bien vous n'en verrez rien! Nada! A part deux pauvres scènes. Ce choix est incompréhensible de la part des scénaristes.
Et qu'on ne vienne pas me dire que c'est par manque de temps que ces "détails" n'ont pas été intégrés car au lieu de l'histoire sombre présente dans le livre (c'est tout de même la guerre, des gens meurent et disparaissent), David Yates nous montre d'interminables pseudo-relations amoureuses entre adolescents (Ginny et Dean, Ron et Lavande, Harry et Romilda, Harry et Ginny, Ron et Hermione, etc...). Franchement, pour un seul film, ça fait beaucoup. De plus, David Yates ajoute l'une ou l'autre scène inutile qui ne figurent même pas dans le roman (L'attaque du Terrier). Mais le comble est atteint lorsque le spectateur se rend compte que l'intrigue qui donne son titre au film est expédiée en deux temps trois mouvements et culmine dans une révélation finale qui tombe complètement à plat... puisque tout le monde s'en fiche, car jamais l'enquête sur l'identité du prince n'a été introduite dans le récit ! Pour finir d'enfoncer le clou, signalons que l'un des gros suspenses du septième roman (dans quel camp est Rogue?) est complètement éventé à cause d'une brève scène inutile (et rajoutée par rapport au roman!) juste avant le climax final. Bref, l'histoire sent le paté.
Mais bon, celà aurait pu passer si le scénario avait été bien construit ou bien présenté, mais il n'en est rien! Les scènes s'enchaînent sans logique ni continuité, passant d'un personnage à l'autre ou d'un lieu à un autre sans que l'on sache vraiment pourquoi et si l'on a pas pas lu le livre, il doit être assez difficile de s'y retrouver. De plus, en changeant sans cesse de lieu, David Yates casse plusieurs fois la tension qu'il était parvenu à insuffler à une séquence.
Tout de même un petit air de Gandalf pour Dumbledore...
En parlant de David Yates, il convient de dire que sa réalisation est parfois ampoulée ! Toujours à la recherche du "plan qui tue", il s'enferme dans un style qui est tout sauf naturel. Certaines séquences sont heureusement époustouflantes visuellement, il faut le reconnaitre, mais d'autres auraient certainement gagné à être beaucoup plus simple et fluides. Par exemple, durant la discussion de Dumbledore et du jeune Voldemort la moitié de l'écran est flou sans que l'on sache pourquoi. Et comme si ce n'était pas suffisant, Yates a, en plus, la mauvaise habitude de quasiment tout filmer en plan serré. On n'est pas dans le Vidocq de Pitof heureusement, mais tout de même, des cadrages plus larges n'auraient pas nuit à l'ensemble surtout quand on dispose de tels décors. On a parfois l'impression que le réalisateur veut cacher un manque de moyens, ce qui n'est évidemment pas le cas ici.
Pour en finir avec les points négatifs, je citerai les couleurs générales du film qui sont assez ternes et donnent de temps en temps le sentiment que l'on regarde un film en noir et blanc. Peter Jackson avait utilisé cette technique dans les Deux tours et le Retour du Roi pour souligner la noirceur du récit mais dans Harry Potter et le Prince de sang-mêlé celà ne fonctionne pas vraiment malgré la qualité incroyable de la photographie puisque l'histoire sombre est remplacée par des amourettes sans intérêt et traîtées avec les pieds.
I'm a poor lonesome wizard...
Heureusement les effets spéciaux sont toujours de toute beauté et les acteurs font plutôt bien ce qu'on leur demande. Daniel Radcliffe se montre d'ailleurs amusant à plusieurs reprises. Mais la bonne surprise vient de Tom Felton qui incarne Malfoy et qui avait un peu disparu dans les épisodes précédents. Il a tout simplement la classe et on ressent bien la pression que son personnage va subir tout au long du film. Tout comme Alan Rickman est toujours parfait en Rogue et le nouveau professeur Slughorn est réussi. Bref, coté casting c'est quasiment un sans-faute. Dommage par contre que l'on ne voie pas une seule fois Voldemort adulte...
En clair, Harry Potter et le Prince de Sang-mêlé pêche principalement par un scénario inintéressant par rapport au livre dont il est tiré mais aussi par une réalisation qui peine à le mettre en image. Ce n'est pas un mauvais film mais les fans resteront sur leur faim.
Un film de David Yates
Avec : Daniel Radcliffe, Rupert Grint, Emma Watson, Alan Rickman