Critique du DVD de Cloverfield
Sortie le 8 août 2008

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Critique de Aurélien
Cloverfield était attendu par bon nombre de personnes comme le nouveau messie du film catastrophe et pour cause ! Souvenez-vous, l’été précédent sa sortie… Les premières bandes annonces proposaient une explosion titanesque en arrière plan et l’écrasement de la tête de la statue de la liberté dans une rue de Manhattan. Les rumeurs allaient bon train sur le net (pour changer…) et le projet Cloverfield se retrouva alors entouré d’un halo de mystère difficile à percer. Tourné dans différents lieux sous différents noms (Slusho ou Cheese...), il se voulait une bête invisible, impossible à cerner avant l’heure. J.J. Abrams a bien protégé la bête et il est grand temps pour nous de nous plonger dans une nuit cauchemardesque qui tient ses promesses haut la main et se hisse rapidement comme un sommet du genre.
Mettons fin à toute tentative de comparaison : Cloverfield est à des années lumière du Godzilla d’Emmerich. D’abord en ce sens qu’il s’inscrit dans un contexte post 11/09 (nous reviendrons sur ce point crucial), ensuite qu’il n’est pas question de héros éradiquant la bête ou culpabilisant certains quant à son origine. Y a une créature en ville et pis c'est tout! Cloverfield est une œuvre profondément humaine, voire humaniste couplée à un film catastrophe puissant. La réalisation pourrait en rebuter certains car, tourné en DV, caméra à l’épaule (décuplant le spectaculaire), le film part du principe qu’un évènement troublant s’est déroulé à New York. On retrouve donc la caméra d’une bande de jeunes qui ont filmé l’intégralité de leur calvaire sur support numérique pour la postérité. Et le spectateur n’est témoin que de ce que contient la dite caméra. Attention tout de même : ça n’est pas le Projet Blair Witch dans la mise en scène (même si l’on pourrait discuter d’un éventuel rapport de méthode de réalisation, bien que les deux œuvres soient fondamentalement distinctes l’une de l’autre dans leur démarche artistique). Le document nous est donc projeté comme un témoignage au cœur de l’enfer.

Première véritable œuvre de fiction post 11/09 dans son postulat, Cloverfield interpelle par l’image comme les télés du monde entier ont pu le faire lors de l’attaque des tours jumelles. Tout ce que le monde a pu voir d’emblée de l’attaque du 11/09, ce sont les images prises sur le vif par les badauds qui ont filmé les attaques via leurs caméras, leurs portables ou tout autre support numérique. Cloverfield atteste de cette nouvelle forme d’information, de cette possibilité de tout voir en détail avec parfois des angles de vue directement inspirés de certains plans des tours en feu qui ont marqué les rétines du monde entier. Cela dit, malgré ce postulat, plus rien par la suite ne maintient de liens avec les évènements du 11/09. On entre de plein fouet dans l’action.

Le métrage de Matt Reeves ne déroge pas aux règles cinématographiques propres au genre, car sous ses dehors de film « vite fait » (je vous assure qu’une certaine presse qualifie le film d’œuvre amateur... à se demander s'ils se rendent compte de leur bêtise) se cache un montage cinglant, à la fois précis dans son découpage et intelligent dans sa façon de montrer et de suggérer. Matt Reeves tient sa caméra avec un savoir-faire indéniable et propose des angles de vue et des séquences qui entrent d’emblée au panthéon des plus grands moments de cinéma viscéral (les SFX se sublimes et s'intégrent parfaitement à l'image). En témoigne cette scène où ce petit groupe de survivant se retrouve pris au milieu d’un gun fight titanesque entre la bête et l’armée. Du pur cinoche qui calme ! Et que dire du vol en hélicoptère, véritable regard halluciné, posé sur le gouffre de l’enfer. La claque du creature feature, j’vous l’dis moi !
Le casting est superbe et chaque acteur porte son rôle avec une hargne d’une crédibilité déconcertante. Car Cloverfield ne se réduit pas à un film catastrophe; il se permet une aventure humaine qui magnifie le contexte et reproduit certes un schéma déjà éprouvé, mais qui marche! Une romance contrariée pousse en effet un jeune homme à traverser New York à la recherche de celle qu’il aime, odyssée anonyme au cœur de l’Histoire. Voilà un scénario d’apparence bateau, mais qui permet à Matt Reeves de magnifier une action dramatique qui fait osciller entre la terreur et l’émotion au travers de séquences intimistes bouleversantes et de morts inattendues. Loin des schémas hollywoodiens classiques, Cloverfield se permet même de ne faire apparaître la première note de musique qu’à la fin du métrage (une composition magnifique d’ailleurs !). Un sentiment de sincérité et de générosité s’échappe de chaque plan, ce qui devrait servir d’exemple à certains fainéants du genre…

Format 1.85 - 16/9 compatible 4/3 - Double couche
Langages : Anglais DD 5.1 - Français DD 5.1
Sous-titres : Anglais - Français - Néerlandais
Les bonus du DVD permettent d'en savoir davantage sur la production du film, dont le mystère restait pourtant entier avant la sortie en salles. Au final, ce sont plus d'une heure de bonus que l'on découvre et sont pour la plupart plutôt intéressants.
- Commentaire audio de Matt Reeves: le réalisateur réussit à nous intéresser, alternant anecdotes, notes de production et détails techniques.
– Document 01-18-08 : Le making of de Cloverfield (27min 12s) : un making-of qui porte pour une fois bien son nom puisqu'il ne s'agit pas d'une succession d'interviews où les protagonistes ne font que s'envoyer des fleurs. On n'y découvre à quel point le secret de la production du film a du être dur à garder. Et de voir que les écrans verts utilisés lors du tournage s'intègrent parfaitement lors de la post-production. On y croit vraiment ! (Pas comme une certaine prélogie...)
– Les effets visuels (21min 36s): un documentaire davantage technique, mais pas pour autant ennuyeux.
– Je l’ai vu ! C’est vivant ! C’est énorme ! (5min 37s): une featurette sur la création de la créature.
– Clover fun (3min 49s): un bétisier peu intéressant.
– 4 scènes inédites (3min 22s) avec commentaire optionnel du réalisateur: des scènes qui n'apportent rien à l'histoire en elle-même mais qui auraient pu très bien faire partie du métrage final sans pour autant ralentir le rythme du film.
– 2 fins alternatives (4min 22s) avec commentaire optionnel du réalisateur. Les deux fins ont lieu lors de la journée à Coney Island des deux amants. Au lieu de se dérouler sur le manège surplombant la mer, l'une se déroule sur le quai du métro, l'autre est plus mystérieuse et davantage optimiste, sur le destin de nos héros et sur la possibilité d'un Cloverfield 2.
– 3 bonus cachés
Si vous n'avez pas vu Cloverfield en salles, ruez-vous sur cet excellent DVD, histoire de recréer chez vous l'ambiance apocalyptique du métrage. Si vous l'avez déjà vu, une deuxième vision vous permettra de saisir de nombreux plans que vous auriez sans doute manqués. En conclusion, l'un des achats indispensables de cet été !